655 715 accidents du travail reconnus en France en 2019. Autant d’histoires difficiles à raconter. Peur du regard des autres, ou de perdre son emploi. Matthieu Lépine, professeur d’histoire-géo, s’est penché sur le sujet, face au désintérêt pour les histoires derrière les chutes, les passages à l’hôpital, les séquelles ou les mouvements répétitifs abîmant les corps. Son blog et son compte Twitter sont des litanies de ceux qui, pour gagner leur vie, ont fini par la perdre. Nous, sept étudiants de l’IPJ Dauphine, avons décidé de nous intéresser également à ces récits, trop peu vus, lus ou entendus dans les médias. Souvent délaissés au profit d’une actualité saturée, ils méritent pourtant d’être mis en lumière.
Arrêts de travail raconte des vies marquées par ces sinistres, de celui qui frôle la mort pour livrer des repas à celle qui accompagne les malades pour reprendre le travail. Un simple moment d’inattention peut briser une carrière. Certains sont employés pour éviter le pire, tandis que d’autres tiennent un macabre décompte. Les malades peinent à faire reconnaître leurs maux, ou ne le souhaitent pas, par peur de perdre leur emploi.
Sur notre site, leurs voix apparaissent sous le sigle du danger et avec une brève carte d’identité. Un rappel des risques auxquels ils font face au quotidien et au labyrinthe administratif se dressant après leur accident. La loi du silence, qui règne dans les entreprises, nous oblige à anonymiser certains récits.
Ces témoignages proviennent de proches ou d’inconnus. Au détour d’une cicatrice qu’on n’ose pas regarder, ou d’une anecdote confiée pendant une soirée. Tous nos interlocuteurs ont accepté de revenir au téléphone, contexte sanitaire oblige, sur ces fardeaux hérités du travail. Nous avons tenté de transmettre leurs témoignages le plus fidèlement possible.