L’automatisation du recrutement : Une pratique discriminatoire ?

L’automatisation du recrutement : Une pratique discriminatoire ?

13 décembre 2017 Robotisation, le faux-ami 0

Dans leur quête pour trouver les meilleurs profils, certaines entreprises font appel au numérique et à l’automatisation des procédures de recrutement pour gagner du temps. Ces nouveaux logiciels sont remis en question.

 

« Malgré les qualités que présente votre candidature, nous sommes au regret de ne pouvoir y donner une suite favorable »  Voilà un exemple de réponse que tout étudiant a au moins reçu une fois durant son parcours professionnel. Chloé, une étudiante en école de commerce parisienne, s’est vue opposer « 20 mails automatiques de refus pour 30 candidatures » lors de sa recherche de son stage de fin d’étude . « Une fois, j’ai postulé un vendredi soir à 21h30 et j’ai reçu un mail automatique le lundi à 8h », raconte-t-elle. Pour faciliter la prise en compte des candidatures, des logiciels sont utilisés, ils permettent la présélection des candidats qui correspondent le mieux aux critères de recrutement, après une analyse automatique des informations contenues dans les CV. « L’objectif final est de ne pas avoir les mêmes candidats qu’avant et éviter toute forme de discrimination », explique Jean Pralong, psychologue et chercheur en gestion des ressources humaines.

 

La 1ère étape de recrutement est décisive

Des expressions ou des mots-clés sont ainsi recherchés, qui permettent d’établir des scores au regard des compétences demandées. « Si tu n’as pas les bons mots clefs, type : Grandes Ecoles de commerces ou grands groupes comme LVMH, tu es écarté », assure Chloé. Cette méthode pourrait éliminer des profils parfois intéressants et d’une grande valeur pour les entreprises. 

« Maintenant, ce que font les gens, c’est d’écrire des mots clefs -LVMH, HEC- en blanc afin de passer la pré-sélection automatique », affirme Chloé. Intégrer des termes invisibles semble être la solution et permet quelque fois de passer à travers les mailles digitales du logiciel et également d’assurer le traitement du CV par une personne physique. Cette astuce est souvent conseillée par des forums de recrutement, les étudiants et aussi quelques encadrants dans les écoles. Certaines personnes refusent d’utiliser cette méthode qu’elle qualifie « de non éthique ». Chloé a finalement réussi à avoir son stage de fin d’études, en passant par son réseau d’école, au sein d’une des entreprises qui l’a refusée.

 

Encore plus de discrimination ?


Ces systèmes, censés éviter toute forme de discrimination semblent pourtant en créer de nouvelles. Jeremy de Lab-RH, leader en innovation RH, affirme : « Dans un recrutement, les meilleures pratiques éliminent toute forme de discrimination. La digitalisation entraîne le mieux comme le pire. Les algorithmes qui permettent le traitement des données sont supposés reproduire les meilleures pratiques pour un processus donné. La réalité de notre monde n’est souvent pas celle-là, et les algorithmes ne font pas exception. Surtout, au-delà de la machine, il y a des humains pour décider, parfois biaisés et donc potentiellement responsables de discriminations. A mon sens, tant qu’il y aura des décisions à prendre, il finira toujours par y avoir des discriminations, si on ne remet pas en cause en permanence les règles de décision. »

Hamza Hennani