Il fait gris dehors, et on sent le froid d’ici. Deux hommes en costumes bleu marine et noir discutent en face de moi. Le sujet a l’air sérieux. L’un fronce systématiquement les sourcils, comme un toc. L’autre remet sa cravate grise rayée tout en écoutant son interlocuteur. Ses cheveux sont noirs et parfaitement peignés. Ils déjeunent.

Assis à une table à côté d’eux, un homme nettement plus négligé se tient avachi sur sa table. Il a l’air de parler tout seul et bouge nerveusement son pied ce qui fait grincer la chaise vide en face de lui. L’un des deux hommes en costard se tourne vers lui, comme exaspéré par ce bruit. L’autre continue à marmonner et à regarder dans le vide en grattant la table avec des mains sales et des ongles jaunis.

Les deux hommes continuent leur discussion que je n’arrive pas à entendre, l’atmosphère a l’air plus détendue, celui de gauche croise ses jambes et s’appuie en arrière. Il a des chaussures vernies noires avec des lacets très fins. Sa mâchoire carrée mastique à un rythme régulier. Il écoute son collègue tout en toisant l’homme à côté d’eux qui ne bouge plus et regarde son plateau vide, ou plutôt son dessus de plateau, un papier imbibé d’une tâche de gras de la taille d’une pomme. Ses cheveux châtains et bouclés sont d’ailleurs aussi gras que cette tâche. Il a une barbe brune aux reflets cuivrés.

Une grande femme blonde aux cheveux longs avec un trench rouge passe devant moi. Son parfum très prononcé laisse une odeur de fleurs recouvrir les effluves de friture qui régnaient jusqu’à maintenant. Elle tient par la main un petit garçon avec un ballon jaune sur lequel est inscrit le M de MacDonalds.