Un an en Erasmus à l’université Paris-Dauphine

Les écarts de niveaux de vie et les critères d’attribution des bourses divergent grandement selon les pays européens. Une chose est sûre: le programme Erasmus aide les élèves provenant de classes modestes ou moyennes, en laissant sur place, des élèves largement moins avantagés. Reportage à Dauphine auprès d’étudiants étrangers.

En juin dernier, le programme fêtait ses 30 ans. Depuis sa mise en place, ce programme d’échanges universitaire européen a fait la joie d’un bon nombre d’étudiants, pressés de découvrir un nouvel univers culturel. Le programme a également eu un succès incontesté grâce à des avantages financiers doubles. L’étudiant ne paie pas les frais d’inscription de l’université d’accueil et peut recevoir une bourse couvrant l’intégralité de son séjour.

Le programme a également eu un succès incontesté grâce à des avantages financiers doubles.

Devant l’entrée de la bibliothèque universitaire de Dauphine, Nora, une étudiante turque aux cheveux bruns bouclés tient un sac à main blanc de la main gauche et son smartphone de l’autre. Elle est arrivée à Paris en septembre. Durant les premières années de son cursus, Nora étudie le management dans l’université de Galatasaray à Istanbul. Depuis son plus jeune âge, elle rêve de vivre dans la capitale . Après avoir passée ses vacances d’été dans les rues de Nice ou de Montpellier à la recherche de la meilleure université pour sa future année scolaire, elle choisit Paris-Dauphine. « Nice est une petite ville, j’avais peur de m’ennuyer. Tu sais, Istanbul est dix fois plus dense que Paris ».

Le logo du programme

Cela ne l’empêche pas d’être désorientée dans toutes les « ailes » et étages de l’université. Depuis le début du semestre, c’est la deuxième fois qu’elle se rend à la BU. Même à Galatasaray, elle reconnaît travailler à la dernière minute,       « Je n’ai pas eu beaucoup de travail jusque-là, et j’ai préféré découvrir la ville, sortir et rencontrer d’autres étudiants ».

A 21 ans, Nora a pu décrocher une bourse étudiante mensuelle de 400 euros pour payer la nourriture et ses activités.  Ce montant varie selon les notes obtenues les années précédentes et non, comme en France, selon les revenus annuels des parents. Elle pourra également toucher l’aide personnalisée au logement (d’un montant de 209 euros à Paris) si elle réalise les procédures nécessaires. Elle déclare : « J’aurais également 500 euros par mois si je valide tous mes cours cette année ».  Le coût élevé de la vie à Paris ne l’empêche pas de se rendre chez le traiteur, ou même de dîner à l’extérieur avec ses amis.

« J’aurais également 500 euros par mois si je valide tous mes cours cette année ».

Alors que l’habillement et le loyer sont horriblement chers dans la capitale, « le forfait téléphonique par exemple, ne coûte rien ici ». Elle avoue, « même Zara est hors de prix ! ». Il ne faut guère oublier qu’un salaire minimum en Turquie peut s’élever à seulement 300 euros (le coût de la vie étant relativement moins élevé).

Le vendredi soir, seize jours avant le début de ses partiels, Nora arrive toute endimanchée à la « meilleure soirée dauphinoise de l’année », les FoliesDau.

Pour se rendre à la soirée, Nora s’est procuré, telle une touriste à Paris, une carte RATP achetée à la borne la veille. « J’habite à 5 minutes de Dauphine, acheter un pass Navigo aurait été idiot. Cela me change totalement d’Istanbul, ou je mets une heure avec les bouchons pour arriver à l’université ! Si je prends le métro, je dois changer au moins trois fois ! ».

« Même Zara est hors de prix ! »

 

La situation est assez différente pour Maria, une jeune madrilène. Tout comme Nora, la jeune femme parle aussi bien l’anglais que le français.

Elle porte un large manteau noir d’hiver. Rares sont les parties de son corps non couvertes par la fourrure. Il est 12h30. Maria et une de ses amies espagnoles sont arrivées à 9h00 pour préparer un exposé.    « Le travail est tellement plus important à Dauphine qu’à l’université Autonome de Madrid, d’autant plus que la majorité des cours sont en français ». Il est judicieux d’ajouter qu’elles suivent un double diplôme avec leur université espagnole: elles voient leurs heures de cours doubler.

Une journée type pour ces étudiantes peut être représentée par les équations suivantes : Dauphine le jour puis fête la nuit. Elle m’annonce, d’un air désespérément joyeux, « Nous restons tard le soir à la BU ». Le sandwich ou le « Crous express » (frites et hamburger), un élément révolutionnaire selon Maria, sont devenus nos nouveaux alliés ».

Maria-Dauphine-Erasmus

Maria (à gauche) et son amie dans la cour de l’université Paris-Dauphine, présentant leur carte étudiante

Après maintes réflexions, les jeunes filles se rendent à la cafétéria « des riches » pour acheter un sandwich. Maria commande un mozzarella, tomate, jambon du pays.

Riche d’un été à Montpellier dans un Summer Camp et plusieurs années de français à l’école, Maria pourrait facilement se faire passer pour une française ou une anglaise. Il suffit d’observer la fluidité à laquelle elle parle et peut passer de l’espagnol, au français ou même à l’anglais. Elles rencontrent par hasard une de leurs camarades espagnoles assise sur les escaliers principaux et s’assoient près d’elle. Cette dernière tient dans ses mains un livre vert écrit en français sur l’histoire du management.  Elle porte un legging noir ainsi que des baskets Nike rose, prête à affronter la salle de sport un vendredi midi. Les filles n’auront mangé qu’un sandwich avant de retourner (fumer et) travailler leurs exposés dans une salle de classe. Avec 100 euros par an de la part de son université et une bourse de 350 euros durant les sept premiers mois de son séjour, la jeune espagnole a dû privilégier les cigarettes roulées. Le paquet revient à 7 euros, contre 5 euros en Espagne.

Dauphine le jour puis fête la nuit.

« MacDonalds est hors de prix et les boutiques sont tellement inaccessibles ». Ces jeunes étudiantes logent dans une résidence universitaire à 20 minutes de Dauphine. Elles partagent une grande cuisine  et possèdent une chambre cosy d’environ 20 mètres carrés pour elles seules. « Cela m’a permis de connaître beaucoup de personnes ». Au-delà de ça, Maria envie le système associatif dauphinois propice à de multiples rencontres.

A son arrivée, Maria est sortie tous les soirs . Elle prenait Heetch ou Uber pour rentrer et « la soirée ne lui coûtait pas cher ».

Concernant les installations sportives à Dauphine, elle déclare : « J’ai payé la carte pour me rendre au sport, mais j’évite d’y aller, il y a toujours du monde et ma résidence propose de belles prestations ».        Elle rentrera bientôt chez elle, pour la 3ème fois depuis son arrivée dans la capitale. « Les billets d’avions sont tout à fait abordables. Il suffit de s’y prendre à l’avance ».

« MacDonalds est hors de prix et les boutiques sont tellement inaccessibles » . 

 

Les étudiants non européens profitent également de larges avantages financiers.

Stebin est en première année de master de droit à la Griffith University (située à Brisbane, en Australie). Il a décidé de passer son année de césure à Paris afin d’explorer la capitale et son dynamisme.

Il observe le large écran noir sur lequel apparait Manuel Valls à l’occasion de l’E-Day (« le carrefour business pour les décideurs européens »). Ses connaissances en politique française se réduisent à l’ancien président de la République , François Hollande.

Parisien pour un semestre, Stebin loge dans un appartement de 9 mètres carrés – le minimum légal – dans le 17ème arrondissement. Côté finances, il s’en sort aisément. Une bourse de 1600 euros lui a été attribué par l’université australienne, ce dernier ayant eu une moyenne supérieure à 5,5/7 (le système de notations en Australie).

Le gouvernement australien lui offre 600 dollars australiens (soit 380 euros environ) pour le semestre. Stebin peut dès lors se rendre en soirées, une préoccupation capitale pour un grand nombre d’étudiants étrangers. Il peut avant tout faire l’aller-retour jusqu’à son domicile. Un vol Paris-Brisbane revient à 600 euros, ce qui reste « correct » d’après lui.

Stebin loge dans un appartement de 9 mètres carrés

Il dit « non » à toutes les démarches administratives de la Caisse d’allocations familiales parisienne. La vie en Australie étant bien plus chère qu’en France (les salaires sont, en parallèle, généralement plus élevés), Stebin a décidé d’économiser pour les sorties : malgré un espace cuisine restreint, il évite les restaurants et toutes autres dépenses superflues.

 

Ainsi, grâce aux bourses fournies par les universités et aux allocations du pays d’accueil, de nombreux d’étudiants ont l’opportunité de passer un an ou un semestre enrichissant à l’étranger. Ces derniers sont majoritairement issus de classes sociales favorisées. Un loyer dans une résidence à Paris ou encore les multiples soirées ne représentent pas de petites dépenses. Il n’est pas étonnant de remarquer que la majorité des étudiants étrangers n’ont pas manqué la soirée organisée par l’association DEE (Dauphine Erasmus Exchange), revenant à 15 euros.

Chaque année, l’université organise le Welcome Day pour accueillir et orienter les nouveaux étudiants étrangers

Les frais d’inscription sont 35 fois moins importants à Paris qu’à Londres.

Finalement, le sentiment retrouvé chez ces étudiants étrangers n’est pas la peur de manquer d’argent à la fin du mois. Au contraire, la joie de vivre et l’entrain animent ces jeunes espagnoles, turques, ou encore australiens qui ne demandent qu’à découvrir, en s’amusant.

En anglais, on emploie les termes « to chill », « to exchange ». Ces mots résument bien le but de leur séjour. Echanger, découvrir, apprendre et s’amuser. Les étudiants mettent de côté les soucis, et déploient tous les moyens pour faire de leur séjour une expérience inoubliable. Enfin, n’omettons pas d’énoncer la position de Paris dans le classement réalisé par l’Etudiant, ordonnant les villes étudiantes européennes selon le coût de la vie. La capitale française se positionne en deuxième place, derrière Londres, avec 915 euros nécessaires par mois, sans compter les frais d’inscriptions, 35 fois moins importants en France.

 

Voilà, malgré tout, les raisons pour lesquelles les étudiants choisissent Paris comme escale dans le voyage que représente leur vie d’étudiant.

 

Lien vers l’Etudiant : (http://etudiant.lefigaro.fr/article/les-5-villes-etudiantes-d-europe-ou-vivre-avec-moins-de-500eur-par-mois_13a7f578-8739-11e7-8e6f-d9a52f727f3c/) .

Claire MIRIBEL

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