Depuis l’état d’urgence et les attentats de Charlie Hebdo, la sûreté à l’Université est épaulée par une société privée, et leur quotidien est partagé entre stress, froid et inattention.
7h25
Le chef de la sûreté de l’université Paris-Dauphine, Patrice Velay est devant l’entrée, cigarette à la bouche.Un livreur l’accoste brutalement car il lui indique que les livraisons ne se s’effectue pas à l’entrée principale mais du côté du Boulevard Fayolle.
Dans le hall se trouve un agent. Il se poste rapidement à l’entrée de l’université pour vérifier les premiers arrivants. L’agent repart saluer des collègues. Une élève et un membre du personnel rentrent sans vérification. 4 autres membres du personnel arrivent sans contrôle. L’un deux se dirige vers le distributeur de billet automatique en face du bureau de contrôle de la sûreté.
7h30
Le chef de la sécurité rejoint son bureau, à gauche du hall. Un homme de ménage passe la lessiveuse. On entend le bruit de la machine résonner dans tout le hall. L’agent de sécurité se poste dans le vestibule, portes fermées pour garder de la chaleur. Dehors il fait deux degrés. Un agent du personnel arrive, l’agent lui serre la main. Dans le vestibule, il souffle, ennuyé. Il rentre dans le hall en se frottant les mains. Il a froid, c’est l’un des principaux problèmes dans son métier raconte t’il. Il rajoute que le stress et le comportement des étudiants sont les autres problèmes. Il se replace à l’entrée. Deux minutes plus tard il revient avec un large sourire, ajoutant que le salaire est aussi un facteur de stress. C’est Saïd, employé par l’agence S3M depuis octobre 2016. Son métier est fatiguant, tendu. Les journées sont longues. Il est debout toute la journée et en ce moment, dans le froid. Il est souvent malade. Il se relaye avec trois autres agents jusqu’à 15H. Une autre équipe arrive entre 15h et 17h et finissent entre 20h30 et 23, heure de fermeture de l’université. La société S3M est une société de gardiennage mandaté par l’université Paris Dauphine pour l’épauler depuis les attentats. Saïd ne sait plus si elle est arrivée après les attentats de Charlie Hebdo le 5 janvier 2015 ou ceux du 13 novembre 2015. Le pôle sûreté de Dauphine a toujours existé. Dauphine est entourée de quatorze ambassades et reçoit régulièrement des personnalités. La sécurité doit être maximale tout le temps. Le plan Vigipirate et la loi anti-terroriste ne font que renforcer leur dispositif.
7h50
où un deuxième agent de la société arrive, dépose ses affaires et commence ensuite à sortir les papiers du bureau de la sécurité situé entre la cafétéria du Crous Express et les meubles à journaux. Il y a la liste des événements du jour .Aujourd’hui une rencontre sur l’apprentissage oblige les agents à avoir une liste de personne à faire émarger avant leur entrée à l’université. Cet index renseigne sur qui est rentré et en cas d’accident combien de victimes doivent être recherchées. Il existe aussi une liste pour les visiteurs extérieurs et les élèves qui oublient leur carte étudiante. De plus en plus de personnes entrent dans Dauphine. Surtout du personnel. Saïd prévient que la majorité du flot va bientôt arriver. Huit cents personnes en deux heures à partir de 8h. « ça ressemble au périph de Paris ».
8H
où un troisième agent arrive café à la main, Alex. Il travaille à Dauphine depuis dix-sept ans. Un quatrième agent arrive, café, viennoiserie et LOTO FOOT sous le bras. La surveillance est plus rapprochée. Saïd rappelle à l’ordre un étudiant qui n’a pas ouvert son sac. Ensuite il met un bonnet avant de sortir. Les portes entre l’extérieur et le vestibule sont grands ouvertes, celles entre le vestibule et le hall aussi. Les courants d’air sont nombreux et l’air est froid. L’année dernière il a fait jusqu’à -5° dans cette allée confie l’un des agents. Un agent est en haut des marches ,avant l’entrée avec un cache nez et ses gants fourrés, deux autres sont dans le vestibule, Alex reste à l’intérieur pour vérifier les cartes et diriger les visiteurs.
L’armure face au froid
8h 10
où un deuxième agent de la sûreté de Dauphine se joint à Alex dans l’entrée pour vérifier le maximum de carte. Le flot de personnes est constant et rapide. Alex crie aux élèves de sortir leurs cartes. Toujours avec « Respect mais fermeté ». Un élève arrive et ne sort pas sa carte. Il se plaint que c’est tout le temps à lui qu’on demande sa carte. Alex lui rappelle l’universalité de la règle. La voix d’Alex résonne de plus belle « on est à Dauphine ici, on se prend en main et on sort sa carte ». Les arrivants ont le regard baissé, fatigués face à un Alex « en moins bonne forme que d’habitude » selon son collègue.
8h40
Alex explique que son métier est un métier avec une formation obligatoire. Il est immatriculé à la préfecture. Il doit savoir reconnaître des visages, regarder vite et agir vite. Plus une personne sourit plus est identifiable facilement. Il doit savoir guider aussi. Il confie qu’il sait comment reconnaître les égarés. Par leur regard en l’air et parfois un air supérieur. Un professeur arrive, un bébé porté sur le ventre. Alex le salue. Le bébé gazouille, et Alex lui rend un sourire. Il se retourne et dit « ne dîtes pas que j’ai souris au bébé ». Alex envisage son métier comme humain, il a besoin de créer de la confiance. Mais un élève irrespectueux peut vite se retrouver en conseil de discipline. Il déplore que certains ne comprennent l’utilité de leur activité.
8h50
Le deuxième agent de Dauphine, Adriano se souvient des attentats; à quel point les gens étaient tendus et suspicieux. Il subit beaucoup de pression. Les agents du vestibule rentrent. Il reste un agent dans l’entrée et un agent de Dauphine, Michel, au bureau.
8h55
Isabelle Huault la présidente de l’université et une collègue cherchent en vain Adriano, volatilisé il y a plus de cinq minutes. Michel explique le problème majeur de la sureté de Dauphine. Tous les agents ne suivent pas les mêmes règles. Il sort le cahier des règles du bureau. Il est indiqué que tous les professeurs doivent avoir une carte. Pourtant tous les agents ne leur demandent pas. « En matière de sécurité on n’arrange rien ». Il regrette les copinages de certains avec des membres du personnels.
9H20
Michel interpelle deux élèves qui veulent afficher une publicité pour leur événement. Il veut voir leur autorisation. Elles contestent en disant qu’on leur a déjà accordé. Michel ne veut rien entendre. La présidente de l’association arrive, ordinateur en main pour apporter une preuve à Michel. Il les laisse afficher. Cela fait aussi parti de son rôle. Empêcher que n’importe qui affiche n’importe quoi à Dauphine. Il reprend sa place derrière son bureau.
9h30
Une professeure arrive, on lui demande sa carte et rétorque qu’elle n’en a pas besoin. Elle travaille en contractuel ici depuis plus d’un an. Michel lui fait écrire sur le registre des visiteurs. Dès qu’il vérifie la carte d’un autre elle part agacée, laissant jute son nom.
Marie Leclercq
Be the first to comment on "Dauphine et la sûreté : une épreuve au quotidien face au froid et à l’indifférence"