A la Renaissance, les femmes ne sortaient jamais sans être chapeautées et gantées, celles sans chapeau étant des femmes de rue. La profession de modiste est donc une très vieille profession qui tend cependant à disparaître. Nadine Barataud Perez, créatrice de chapeaux depuis 25 ans est une des modistes encore en exercice.
Une création de Nadine
Son parcours est assez atypique. Depuis toujours attirée par les métiers artistiques et aimant coudre, elle se spécialise dès le début de ses études dans ce domaine. Diplômée, elle est embauchée dans une entreprise où sa mission était de réaliser des patronages pour des vêtements de haute couture. Elle a ensuite monté sa propre entreprise avec ses sœurs et son mari, spécialisée au départ dans les vêtements sur mesure. La clientèle a très rapidement demandé des chapeaux correspondant aux tenues. Nadine a alors dû engager une modiste. Cependant, cette dernière ne connaissait pas son métier. « Elle achetait plein de belles matières et les a toutes sabotées » raconte Nadine. Pendant un an, les matières rescapées sont restées stockées dans une cave. La clientèle était toujours en attente de chapeaux, et face à cette demande, Nadine s’est mise à créer des chapeaux à la fois en auto diktat, mais aussi grâce à des rencontres avec d’anciennes modistes. « Elles m’ont appris un savoir-faire, de plus en plus rare à trouver de nos jours » raconte Nadine.
Sa boutique, les jardins de la mode se situe dans le XVIème arrondissement de Paris. En période de soldes, sa vitrine est remplie de chapeaux et le mot « soldes » est inscrit en grand sur celle-ci. Le comptoir se trouve au fond de la pièce. Ce meuble sert aussi bien de caisse que de plan de travail pour créer ou remodeler un chapeau. Quand il n’y a pas de clients, très souvent il sert aussi de table à manger, avec thé et biscuits. Dans l’arrière-boutique se trouvent une cuisine et un bureau où tous les papiers sont rangés. C’est au sous-sol que se trouve l’atelier de création de Nadine.
Nadine dans son atelier
Cet atelier est une caverne d’Ali-Baba pour les connaisseurs. Il y a toute sorte de tissus rangés dans des cartons bien organisés sur des étagères. Nadine nous montre des échantillons. D’abord, de la dentelle de crin, une matière peu connue. « Je pense qu’aujourd’hui, ce sont des matières qui ne sont plus fabriquées » explique Nadine d’une voix passionnée. Le crin est quant à lui une matière très souple, ce qui permet de faire apparaître des formes sur les chapeaux. Il y a aussi des voilettes, une matière ancienne autrefois déposée sur le visage, ce qui permettait aux femmes de cacher une ride ou une larme lors du mariage de leur enfant, par exemple. De nombreux moules à chapeaux permettant de modifier leur taille, des marottes qui sont des têtes de femme dont se servent les modistes ont aussi leur place dans l’atelier de Nadine.
Le crin, une matière très souple
La durée de création d’un chapeau est très variable. C’est surtout le fait de l’imaginer et de trouver les matières adéquates qui prend du temps. Ensuite, en fonction de la façon dont est créé le chapeau, la durée de fabrication varie aussi. S’il est moulé à partir d’un moule spécifique qui confère au chapeau sa forme, cela prend une semaine. Ces moules sont très spécifiques à la profession de modiste. Ils sont fabriqués à partir de bois de tilleul qui est un bois très souple, permettant de clouer le chapeau dessus, au fur et à mesure de sa fabrication. Si le chapeau est cousu, en deux jours celui-ci peut être terminé. Des modifications peuvent par la suite y être apportées, notamment un changement de la taille.
Ainsi, l’inspiration peut être compliquée à trouver. Pour en avoir, il faut être très au courant de ce qui se fait dans le monde de la mode et donc fréquenter les salons de prêt-à-porter, regarder des défilés de mode, feuilleter des magazines etc. Connaitre les tendances est aussi très important et notamment les couleurs, six mois avant qu’elles ne le soient puisque c’est à cette date que la collection est créée. Mais très souvent, l’inspiration vient des clientes, de leurs demandes. « Les clientes vont arriver et aller toutes dans le même sens, c’est-à-dire vouloir des chapeaux aux couleurs tendances » explique Nadine.
Les clients se rendant dans sa boutique n’ont pas un profil type. Il y a des clients lambda venant chercher des chapeaux pour la vie quotidienne. En plus d’en créer, Nadine vend aussi des chapeaux de marque comme des Stetson par exemple. Aussi, à partir d’un chapeau déjà existant, elle peut changer un détail pour le rendre tout autre. Mais très souvent, les clientes viennent dans la boutique pour une occasion spéciale, une cérémonie ou un mariage. Par exemple, une cliente est venue chercher un chapeau pour un mariage qui était la semaine d’après. Ne trouvant pas son bonheur, Nadine lui a proposé de revenir deux jours plus tard avec le tissu de sa robe pour que le chapeau soit bien cordonné avec celle-ci. Des clients un peu moins lambda viennent aussi rechercher des chapeaux dans la boutique de Nadine. En effet, parmi ses clients nous pouvons trouver des personnalités princières, politiques ou évoluant dans le domaine artistique. La qualité du chapeau proposé est un atout majeur et très recherché par les clients. Le métier de modiste est donc précieux et a encore de nombreux jours devant lui.
Elsa Bleuzen
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