Un soir avec une association de Paris Dauphine qui vient en aide aux sans-abri.

Fleur de Bitume (FDB) est une association de l’Université Paris Dauphine qui œuvre pour « lutter contre toute forme d’exclusion ».  Pour agir dans ce but, l’association s’organise autour de trois initiatives : l’enseignement du français à des réfugiés, des cours de soutien à des élèves en difficulté scolaire, et enfin, l’organisation de maraudes.

Chaque dimanche soir, Gare de Lyon, qu’il vente, qu’il pleuve ou qu’il neige, Fleur de Bitume distribue de la nourriture aux sans-abris.

Il est 19h30 quand la distribution commence, une vingtaine de bénévoles s’agite en séparant les denrées alimentaires en deux. Un groupe ira vagabonder dans les rues tandis que l’autre se postera sur le parvis de la gare de Lyon, dominé par la tour de l’Horloge.

Parvis de la Gare de Lyon

Beaucoup des « maraudeurs » sont membres de l’association. Il y a toutefois de nombreux volontaires ne faisant pas partie de FDB. En effet, toute personne désireuse de participer à cette belle action est la bienvenue. Certains sont ici parce qu’ils sont amis avec des membres de FDB, d’autres connaissent l’événement grâce au bouche à oreilles, tandis que certains sont des « initiés » ayant déjà participé à d’autres maraudes. Toutefois, ce jour-là « il y a plus de monde que d’habitude », dit Eugénie, une des membres de l’association. « En moyenne on est souvent aux alentours de 10 bénévoles ».

Peut-être que le temps glacial de ce dimanche soir en a motivé davantage.

Ce soir-là, des flocons de neige planent dans la nuit, il fait un froid de canard. Thés et cafés sont les plus demandés. « Avec du sucre Monsieur ? – Oui deux sucres s’il te plait ». Les denrées servies sont majoritairement des sandwichs de pain de mie élaborés au préalable par les bénévoles. Des petits gâteaux circulent également, et parfois, certains sont friands des soupes déshydratées. Les thermos d’eau brûlante fument du bout de leur bec. Bientôt vides, ils seront remplis à nouveau dans une cafétéria de la gare où le serveur accepte directement la demande, paraissant habitué. Les bénévoles proposent également des produits d’hygiène : savon, shampoings, antiseptiques, lingettes (…). L’ensemble de ces « provisions » sont achetées par l’association qui chaque année reçoit une subvention de l’université Paris Dauphine qui leur permet de financer l’ensemble de leurs maraudes.

Provisions

Mais pourquoi sortir de chez soi un dimanche soir ?

Ce jour de paresse où notre pyjama nous colle à la peau ? « En réalité, on vient ici avec plaisir », confie Sarah, une des bénévoles. « Leur donner de notre temps est pour eux une preuve qu’on se préoccupe d’eux. Beaucoup nous remercient. »

C’est une réalité que l’on remarque très vite. Avec les bénévoles, les SDF ne sont plus considérés comme tels, ils deviennent des visages animés, des blagueurs, certains même me semble-t-il, des amis.  Quelques-uns sont à la rue depuis peu, d’autres depuis toujours. Certains ont même un emploi, mais dont les revenus ne suffisent pas. Les profils sont variés, et les rencontrer permet de constater que ces visages ont des histoires bien différentes.

Renald, un sans-abri qui connait bien l’équipe de Fleur de Bitume est ravi de constater que les bénévoles « ne sont pas que des distributeurs de sandwich, mais qu’ils sont enclin à discuter et à tisser des liens ». Pour preuve, beaucoup connaissent les prénoms des uns et des autres. « Eric le Belge », comme on le surnomme, est un petit homme dynamique qui, lorsque qu’il s’approche du groupe s’exclame rieur : « Il est où T-X, qu’il me serve mon café ! » (T-X étant le surnom d’un des bénévoles). Ceux qui désirent discuter restent, les autres s’en vont avec un « merci » du bout des lèvres. Le plus étonnant est l’absence de plainte de la part des sans-abri. Ils discutent de ce qui les tient à cœur, certains enchaînent les vannes, comme Renald, dont le répertoire de blagues n’a pas de limite : « Tu sais ce que ça veut dire SDF ? Sans Difficulté Financière. Tu sais ce que ça veut dire RATP ? Reste Assis T’es payé. Tu sais ce que ça veut dire ANPE ? Avec Nous Peu d’Espoir ». La maraude se fait ainsi dans une ambiance détendue. Le lien avec certains sans-abri est touchant, certains viennent même dire au revoir aux bénévoles en leur faisant la bise. « A la semaine prochaine ? – Oui, je serai là. Bonne soirée. »

Lorsque l’immense horloge de la gare indique 22 heures, il est temps de repartir.

Les sacs de provision sont presque vides et nos bouts d’orteils sont congelés. Chacun des bénévoles prend son sac et se dirige vers le métro. Ce soir-là, une bonne partie d’entre eux se retrouveront dans un fast-food afin de partager un repas bien équilibré. « Être dans une association, c’est aussi avoir un bon groupe de potes qui ont tous cette même fibre de solidarité », me confie Lara, une bénévole.

Repas entre amis-bénévoles

 

Andréa MARTEL

 

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