Installé en 2009 à Juvisy-sur-Orge (91), l’épicerie-traiteur italien Da Matteo a fermé ses portes au mois de juin dernier et a rouvert à la rentrée une rue plus loin. Changement de décors et de concept pour ce commerce devenu emblématique du centre-ville. Finie l’épicerie, Laurent M. – le gérant – souhaite désormais se tourner vers la restauration. Mais cette reconversion n’a pas encore séduit tous les clients.

 

 

« Merci. A très bientôt ! ». Tels sont les mots que l’on pouvait lire sur la devanture fermée du magasin Da Matteo fin juin dernier. Le traiteur décidait de fermer boutique, après 9 ans d’existence. Comme nous l’explique Laurent M., l’épicerie ne lui convenait plus, financièrement et surtout intellectuellement. Lassé, il décide alors de monter un nouveau projet : un « social bar ».

« Je veux créer l’endroit le plus cool du monde, pour que plus jamais on ne se demande : Qu’est-ce qu’on fait samedi soir ? ».

Il souhaite avant tout en faire un lieu de rencontre, où les gens viennent pour se détendre, discuter, créer des liens, autour d’un bon plat italien. Des livres et des jeux de société sont mis à disposition. Le lieu est simple, la décoration vintage épurée. Réchauffés par la lumière des bougies disposées sur les quelques tables mises à disposition, le sifflement de la cafetière en bruit de fond, l’ambiance est chaleureuse.

Sans argent, il a retapé le local lui-même durant tout l’été, chinant des objets par ci par là, et donnant une « seconde vie » à ces objets. Ainsi, des planches pour le sol décorent aujourd’hui le mur et les nouvelles tables et chaises du restaurant sont dépareillées, ce qui donne une ambiance vintage et très originale. Il a fait appel à la générosité des gens en levant ce qu’il appelle « un crowd founding de la connaissance ». Sur les réseaux sociaux, il a donc invité ses clients à venir l’aider durant les travaux du magasin, en échange d’un verre offert par la maison. Cela a fonctionné, puisque qu’il est toujours très suivi sur Facebook, et plusieurs personnes lui ont volontiers donné un coup de main cet été.

 

Une communication très réfléchie

Laurent M. fait toute sa communication sur les réseaux sociaux, en particulier sur Facebook, où il se met en scène dans des vidéos pour raconter aux Juvisiens l’avancement du projet. Cette communication sous forme de web-série a pour but « d’impliquer les gens, pour que ce lieu ne soit pas le mien mais le lieu de tous ». D’apparence spontanées, ces vidéos sont, comme nous l’explique le commerçant, très réfléchies, « presque scénarisées ». « Pour que cela marche, il faut qu’il y ait de la tension. Donc j’exagérais dans mes vidéos, j’amplifiais les hauts, comme les bas ».

 

Des clients aux avis mitigés

A la rentrée, il a donc rouvert avec trois activités : il continue de servir des pasta box le midi ainsi que le service d’épicerie-traiteur, et ajoute donc le service du soir. Si la clientèle du midi l’a suivi, il ne voit plus grand monde entrer dans son magasin après 14h. Avec le recul, il analyse cela comme « une erreur de communication. J’ai voulu faire trop de choses, ce qui a rendu le concept du magasin trop flou. Les gens ne comprenaient plus. ». Deux mois après l’ouverture, il décide de faire une pause d’une dizaine de jours, fermant le magasin, pour réfléchir à la façon de relancer son activité. A partir de ce lundi 10 décembre, il arrêtera donc définitivement l’épicerie-traiteur et se concentrera sur la restauration. Ainsi, le magasin sera ouvert jusqu’à 14h en semaine, et les vendredis et samedis soir pour des apéros-dinatoires ou pour déguster un bon plat de pâtes. Il sera aussi possible de privatiser le restaurant le jeudi soir. Enfin, Laurent M. compte organiser des soirées à thème régulièrement. La première est prévue au mois de janvier et portera sur le Chemin de Compostelle.

 

Un choix qui mitige. Pendant l’après-midi, trois clients passeront chercher quelque chose à manger pour le soir, deux repartiront déçus. Mais une cliente venue avec sa fille, reste et s’assoie à l’une des tables pour déguster un chocolat chaud. Cliente peu fréquente de l’ancien magasin, elle a surtout connu le projet sur Facebook et est emballée :

« Je trouve cela super ! Il manque un endroit sympa pour sortir le soir à Juvisy !».

Elle est d’ailleurs surprise que cela ne séduise pas davantage les habitants. « Je suis très étonnée, je pensais qu’il y aurait une clientèle sur Juvisy ».

Laurent M., lui, ne se décourage pas. Il remarque déjà une amélioration ces dernières semaines et espère qu’avec son changement de stratégie, son magasin deviendra the place to be à Juvisy. Il est conscient que ce changement lui coûtera des clients.

« Je sais que je vais perdre des clients, je vais en gagner d’autres. C’est tout le principe d’une transformation ».

A la question « Combien de temps vous donnez-vous pour que votre restaurant fonctionne ? », il répond « Je me laisse quelques mois. Si d’ici là, cela ne fonctionne pas, je fermerai et ferai complètement autre chose. Ce ne sera pas grave, j’ai plein d’autres rêves en tête ».

 

Maël Gonnot