La crise sanitaire a entrainé de nombreuses personnes dans la précarité mais également un élan de solidarité envers les personnes isolées. Comment continuer de créer du lien social pendant le confinement ? C’est un des objectifs de l’épicerie solidaire La Croix Rouge du 15ème. Cette épicerie solidaire permet d’éviter le gaspillage alimentaire, de nourrir des personnes qui sont dans le besoin, mais surtout de créer du lien social.
Jeudi 10 décembre, 17h30, il fait déjà nuit. Cinq personnes attendent patiemment leur tour à l’extérieur du petit local de l’épicerie solidaire 71 rue de l’Amiral Roussin. Tout au long de l’année, elle accompagne plus de 300 foyers dans le besoin. Depuis son année de création en 2013, elle est ouverte deux fois par semaine, le mercredi et le jeudi après-midi.
Un accompagnement complet et encadré pour un projet concret
Les bénéficiaires sont envoyés par des assistants sociaux en fonction de leur situation. « Ils arrivent toujours avec un projet très concret, souvent pour une durée de trois mois » explique Fabrice Jaffré, responsable adjoint des maraudes de l’unité locale du 15ème arrondissement. Chaque foyer dispose d’un budget (qui dépend de la situation familiale, du nombre d’enfants), qui va leur permettre d’économiser de l’argent pour rembourser un découvert bancaire ou des dettes, remplacer un frigo, partir en week-end. Une fois l’objectif atteint, on considère que la mission est terminée. L’accompagnement est encadré par les bénévoles de La Croix Rouge française. Les bénéficiaires doivent se rendre à l’épicerie solidaire une fois par semaine et sont dans l’obligation de justifier leur absence s’ils ne viennent pas.
Lors de leurs visites, ils sont accompagnés financièrement mais aussi nutritionnellement. Dans le rayon des fruits et légumes, une bénévole expliquait à un père de famille différentes manières de cuisiner un poireau. « Vous avez de la chance, on vient de recevoir 80 kilogrammes de légumes ! » s’exclamait une autre bénévole au fond du magasin.

À l’intérieur de l’épicerie, le prix qui est affiché sur un produit n’est pas celui que va payer le client mais celui qu’il paierait s’il faisait ses courses dans une épicerie ordinaire. À la caisse, les clients bénéficient de 20% de réduction et de remises supplémentaires en fonction du panier et des produits disponibles. Au moment de payer, les bénévoles disent pour chaque client « Vous en avez pour [prix du marché] et vous nous devez [prix après remise] ».
Créer du lien social, un objectif à part entière pour l’épicerie solidaire
Les bénéficiaires sont issus de milieux sociaux très variés, de différentes nationalités. Il s’agit majoritairement d’une population en grande difficulté financière. Leur point commun est l’isolement. Pour Laurence Bruneton, co-directrice de l’épicerie et trésorière de l’unité locale du 15ème, « quand t’as plus d’argent, t’as plus d’amis ». Pour beaucoup d’entre eux, se rendre à l’épicerie représente leur petite sortie de la semaine, et encore plus en période de confinement.
Laurence ajoute que l’objectif n’est pas seulement de les nourrir mais vraiment de créer du lien social. Les membres bénévoles de l’épicerie solidaire peuvent mettre en relation les bénéficiaires avec d’autres services de La Croix Rouge, par exemple pour de l’aide administrative ou encore des cours de français. Ils peuvent également les orienter vers d’autres associations plus spécifiques, selon leurs besoins. Au cours des visites à l’épicerie, de vrais liens se tissent entre les bénévoles et les bénéficiaires. « On rigole beaucoup avec eux, par exemple, fin juin, on a les résultats du bac en direct » s’exclame Laurence.

L’épicerie peut aussi favoriser les rencontres entre les clients. À l’entrée, il y a une salle d’accueil avec des fauteuils, un espace pour prendre le café ou le thé avec des gâteaux et des chocolats. Les discussions peuvent notamment favoriser l’entraide. L’obligation de respecter les mesures sanitaires ne permet plus de profiter de cet espace mais on observe que des conversations des conversations et des rires s’échappent de la file d’attente devant le local de l’épicerie. « Le confinement a chamboulé toute l’organisation » explique Laurence.
Une forte générosité en temps de crise sanitaire
Fabrice affirme qu’en cette période de crise sanitaire, « les gens ont été plus nombreux à donner ». La réserve se trouve au sous sol de l’épicerie. Elle est remplie de nourriture en conserve, en bocaux, en sachet, mais aussi de produits d’hygiène, de couches pour bébé ou encore de serviettes hygiéniques. Lors de la collecte du week-end dernier, l’épicerie solidaire du 15ème a récolté treize tonnes de produits de première nécessité en trois jours. Les clients se sont montrés plus solidaire lors des collectes dans les magasins.

Mais les collectes ne sont pas les seules sources d’approvisionnement de l’épicerie. Depuis sa création, elle a développé de nombreux accords, notamment avec Monoprix, Naturalia, Intermarché et très récemment avec la Grande Épicerie du Bon Marché. La Croix Rouge récupère les produits qui sont sur le point de se périmer, les invendus, le surplus. Ces partenariats permettent de faire prendre conscience aux magasins de ce qu’ils jettent et garantissent à l’épicerie des produits de grande qualité.
Elisa Féliers
Be the first to comment on "Au cœur de l’épicerie solidaire La Croix Rouge du 15ème arrondissement de Paris."