Au lycée Vincent Van Gogh d’Aubergenville, difficile quotidien entre COVID et réforme

Au lycée Vincent Van Gogh d’Aubergenville, petite ville des Yvelines située à une trentaine de kilomètres de Paris, la fatigue et le stress se font ressentir, résultat d’un premier trimestre conjuguant pandémie et changements profonds du système éducatif.

Ce jeudi 10 décembre, en franchissant les portes du lycée Vincent Van Gogh d’Aubergenville, la viste débute avec un arrêt à l’un des deux distributeurs de gel-hydroalcoolique de l’entrée. Tout près d’eux, une grande pancarte déroule la liste des gestes barrières. A quelques pas, un sapin de noël au pied duquel se tient fièrement un petit bonhomme de neige en gobelets plastique. Le vaste hall résonne de silence, les élèves sont rares.

Démotivation générale?

Pour les trouver, il faut entrer dans les salles de classes. Mais là encore, il n’y a pas foule. Les effectifs sont réduits de moitié, formant des demi-groupes présents à tour de rôle toutes les deux semaines. A 10h30, en cours d’histoire, ils sont 15, des terminales. Passage obligé : nouvelle dose de gel hydro-alcoolique avant de prendre place. Les distances – la politique d’une chaise sur deux – sont respectées par la plupart et les masques couvrent les visages. La leçon débute. « Des questions sur le cours ? » demande le professeur, M. Gueguen. Pas une main ne se lève. Face à sa classe silencieuse l’enseignant poursuit. Les trousses n’ont pas été ouvertes. Les cahiers restent, eux aussi, fermés. Quand ils sont interrogés, c’est le silence. Un contrôle est prévu pour le lundi suivant. Un peu abattu le professeur ironise « de toute façon le cours sera sur Pronote ». Les élèves, passifs, attendent que la sonnerie vienne signaler la fin de l’heure.

Dans la cour, au moment des pauses, les distances s’oublient un peu. Les masques se glissent sous les mentons pour laisser place aux cigarettes. Un tableau presque normal, du temps où le coronavirus n’était qu’un conte chinois. Quelques rires, mais c’est surtout la tension et la fatigue qui se lisent dans les yeux de ces lycéens. Certains comme Pauline, élève de terminale, trouve le système d’hybridation – un jour sur deux au lycée – « perturbant » et se dit « beaucoup plus stressée ». Elle fait partie de ceux préférant les cours totalement distanciés, mais reconnaît que le suivi est bien meilleur qu’en mars. 

« L’éducation nationale c’est le Titanic »

L’ambiance en salle des profs est un peu plus joyeuse. Certains s’affairent derrière leurs ordinateurs, et d’autres discutent, assis sur les canapés rouges de la pièce. Les sourires se devinent sous les masques. La positivité est de mise, « heureux de pourvoir travailler ». Néanmoins, les discours s’animent, plus amers, autour de la réforme. « L’éducation nationale c’est le Titanic » lance une professeure de langue sur le pas de la porte, et « Blanquert danse sur le pont ». Le constat est unanime : la nouvelle conception du lycée ne passe pas. Cela tient notamment de la disparition des classes, transformées en groupe de spécialité. Au fond de la pièce, un tableau blanc sur lequel mots d’encouragements se mêlent aux sujets plus lourds comme « les dangers de l’hybridation ». Reflet concret d’une atmosphère antinomique, partagée entre volonté positive et une réalité autrement plus compliquée. 

Escale dans le bureau du proviseur adjoint, M. Violet, petit homme caché par les piles de dossiers. Lorsqu’est évoquée la communication avec le ministère sur la mise en place des nouvelles mesures sanitaires : soupir. Adossé au dossier de sa chaise, il explique qu’on « apprend plus de choses à la télé » et déplore le « manque de visibilité ».

Réforme et COVID: quotidien difficile pour les professeurs

A 15h30 doit commencer un conseil de classe. « Mais de quelle classe ? » raillent les professeurs, « Elles n’existent plus ». Un mélange entre distanciel et présentiel : une dizaine d’enseignants sont présents dans la salle, et quelques autres en « visio ». Les problèmes techniques s’enchaînent. Entre l’écho des micros ou les difficultés de connexion, les rires se font nerveux, mais peinent à cacher un agacement général. En attendant, cafés, thés et petits gâteaux sont servis. A 16h15 la réunion démarre. Un quart d’heure plus tard certains doivent déjà repartir. Les enseignants semblent abbatus, frappés par la difficulté de devoir cumuler réforme et pandémie.

Finalement, quand sonne 16h30, il est temps de quitter le lycée, laissant un conseil de classe tout juste entamé, sans oublier le dernier coup de gel avant de franchir les portes. 

Léana Enjalbert

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