En maraude avec « Fleur de Bitume »

L’association solidaire Fleur de Bitume Dauphine, créée en 1996, regroupe une quarantaine de bénévoles avec un objectif : la lutte contre l’exclusion. L’association se divise en trois pôles dont le pôle « Pain perdu », exclusivement dédié à l’organisation de maraudes.

Il est 17h30. Aux abords de la gare de Lyon, à Paris. L’angle du boulevard Diderot et la rue de Chalon est illuminé par un beau soleil printanier. Des membres de l’association Fleur de Bitume et Dauphine Junior Consulting arrivent peu à peu au point de rendez-vous. Mélanie, co-responsable du pôle « Pain perdu », en charge des maraudes, accueille chaleureusement tout le monde. Les bénévoles se scindent toujours en deux équipes : une qui part vers la gare Austerlitz, l’autre vers la gare de Lyon. C’est pourquoi les associatifs répartissent les différentes denrées dans des sacs afin que chaque groupe dispose de toutes formes de produits. Fleur de Bitume distribue aussi bien de la nourriture (madeleines, biscuits, sandwichs, pâtes chaudes, viennoiseries…) et des boissons chaudes, que des produits d’hygiène (shampoing, savon…) ou des vêtements. « Avant la maraude, on fait un sondage sur le groupe pour savoir qui apporte quoi et ne manquer de rien », me précise Mélanie.

Alors que nous n’avons pas quitté le point de rendez-vous, des hommes et des femmes viennent déjà à notre rencontre : un jeune homme nous demande un café ainsi qu’un croissant. Une femme d’une soixantaine d’années sollicite également notre aide.

Des sans-abris en soif d’échanges

Après environ une demi-heure, l’équipe composée d’environ une dizaine de membres, entame son tour vers les abords de la gare en remontant le boulevard Diderot. Premier arrêt sous un pont où sont installés deux sans-abris dont Nasser avec qui Mélanie discute assez longuement. L’endroit est extrêmement bruyant et très passant. Nasser confie être parfois réveillé la nuit par le bruit des ambulances qui passent sans interruption. Lorsque nous repartons, Mélanie explique : « Il y a beaucoup d’échange et de sympathie, notamment avec les personnes qu’on voit chaque semaine. ». Garance, rentrée dans l’association Fleur de Bitume en L3, renchérit : « On a une relation assez personnelle avec les gens, on les connaît bien. Une maraude, ce n’est pas uniquement distribuer de la nourriture, c’est aussi créer du lien social. Les sans-abris ont autant besoin d’un support matériel que psychologique ».

Après avoir parcouru quelques dizaines de mètres, l’équipe effectue un deuxième arrêt sous une des arches du Viaduc des Arts où sont installées six petites tentes. L’ambiance est calme, un poste radio diffuse la chanson People Help the People. Parmi les occupants de lieux, trois jeunes hommes ne parlent pas français et ont du mal à comprendre les paroles qui leurs sont adressées mais acceptent finalement un paquet de céréales avec un grand sourire. Un autre monsieur, très gentil et bavard, raconte à des bénévoles des anecdotes de sa vie dans la rue avec une légèreté déconcertante. Au moment où nous partons, il nous gratifie d’un « Merci d’être venu nous voir c’est trop cool », puis lance avec un sourire espiègle : « Travaillez-bien à l’école. ».

De la méfiance à l’enthousiasme

Sur la suite du trajet, nous croisons une femme prostrée sous un porche, cachée par un parapluie. Une des bénévoles va la voir puis revient instantanément. « Elle refuse quasiment systématiquement toute aide et est souvent agressive. Parfois, quand des membres de l’association essayent d’aller la voir, elle brandit un bâton au loin. » m’explique Garance. « Parfois, des gens refusent notre aide, nous insultent, voire sont violents mais ça reste rare. » ajoute-t-elle.

Après plusieurs autres arrêts, la maraude prend fin près d’une des entrées de la gare de Lyon où plus d’une dizaine de personnes, notamment des jeunes, sollicitent les bénévoles. Les demandes en boissons chaudes affluent : le peu d’eau qui restait dans les thermos est fini en quelques minutes à peine. Une des bénévoles propose des pâtes à un monsieur déçu qu’il ne reste pas de sandwich. La réponse est éloquente : « Est-ce-que c’est fait avec amour ? Si oui c’est l’essentiel. ».

L’eau chaude, les biscuits, les sandwichs et les pâtes sont maintenant finis. En entrant dans la gare pour aller prendre le métro, nous croisons le chemin d’Éric, un habitué des maraudes du dimanche soir. Même si l’association n’a plus rien de matériel à lui offrir, la seule présence de Mélanie avec qui il échange quelques mots semble lui redonner le sourire. « A la semaine prochaine ! » lance-t-il en s’éloignant.

Hélène Guy

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