Partir en Erasmus à l’université libre de Bruxelles pouvait sembler une bonne idée. Mais les restrictions sanitaires rendent l’intégration des étrangers difficile voire impossible. Des milliers d’étudiants sont plongés dans la solide extrême et parfois dans une grande précarité.
« Bruxelles est une ville étudiante, ca grouille de vie partout en temps normal » assure Ambroise Joly, étudiant en 2ème année de Pharmacie. Pourtant, l’immense campus est aujourd’hui complètement vide. Les couloirs sont peuplés d’un ou deux individus mangeant un Mc Donald dans un bâtiment complètement vide. Dehors, une longue file s’agglutine devant un bâtiment. Il semble qu’il y ait enfin de la vie. « Ici on fait la queue pour la distribution alimentaire » précise une étudiante. Une vingtaine d’élèves attendent patiemment leur tour. « Avec le Covid, c’était impossible de trouver un travail. En plus à Bruxelles il faut parler français et flamand pour espérer trouver un emploi. ». Les étudiants étrangers font face à une double difficulté financière : impossible de trouver une petit boulot pour payer leur loyer en raison des confinements. Et la barrière de la langue n’avait pas été anticipée par les étudiants français.

« Les œuvres sont moroses mais ce sont les ressentis des étudiants »
A l’étage du bâtiment principal, seul lieu de vie, se trouve un musée sur le confinement. A l’entrée, un étudiant s’occupe de l’accueil des visiteurs. Les explications sur la distanciation sociale et les précautions à prendre dans le musée s’éternisent comme s’il n’avait parlé à personne depuis 6 mois. Avant de finir son soliloque, il ajoute que « ces œuvres ont été faites par les étudiants de la fac ».
Les œuvres en questions sont sinistres, alors que l’une représente une toile noire parsemée de représentations de virus, un livre sur les angoisses fait suite. L’œuvre la plus marquante est celle d’un ours qui se trouve pendu au bout d’une corde. « C’est un peu morose en effet, mais ce sont les ressentis des étudiants : vous savez ici la plupart sont étrangers, ils n’ont aucun ami, pas de famille en Belgique, alors le confinement a été très dur » précise l’agent d’accueil.
« Tous ceux qui se sont réunis ont écopé d’une semaine d’exclusion »
Alors que l’ULB est connue pour son intégration, il semblerait que celle-ci ait été complètement abandonnée cette année. Ambroise se rappelle qu’« une grande tente avait été installée sur le campus en début d’année pendant une semaine. On a pu faire des soirées, rencontrer les autres étudiants ». Mais au bout d’une semaine, mesures sanitaires obligent, tout fut fermé, le confinement a suivi : les TP et TD disparus. Impossible de rencontrer une vie humaine pendant les 6 mois qui suivirent. Léonard Mathieu, étudiant en pharmacie et parisien d’origine ajoute désemparé : « Je suis arrivée en septembre ici et je n’ai aucun ami, aucune connaissance. Ce n’est pas mon pays ici, je n’ai aucun repère je suis juste seul à l’étranger ».
La responsable de la liaison entre les élèves et la fac assure pourtant avoir envoyé de nombreux mails pour alarmer sur la situation des étudiants. « A Bruxelles c’est différent, ici se mélangent des étudiants étrangers. L’intégration est très importante, bien plus qu’ailleurs. Mais la fac ne veut rien entendre ». L’étudiante a alors décidé d’organiser un après-midi au soleil au bois de la Cambre en février lors d’une journée ensoleillée. « On s’est retrouvée à 45 au bois, c’était génial, on a enfin pu se voir ». Mais des élèves mal intentionnées (ou trop bien), ont décidé d’envoyer des photos à l’université pour les dénoncer. « Tous ceux qui s’étaient réunis ont écopé d’une semaine d’exclusion ».
Les associations ont stoppé leur intégration
Les associations aussi semblent avoir fermé leurs portes. Alors qu’en France celles-ci sont le dernier repère pour pouvoir se faire des amis en dehors de l’université ; les sanctions encourues à l’ULB sont telles en cas de rassemblement, que toutes ont décidé de stopper leur intégration pour une durée d’un an.
Aujourd’hui, les étudiants ont une lueur d’espoir. L’état belge a reçu une plainte pour ses mesures anti-covid et dispose de 30 jours pour les lever. Un TD de 4 heures en présentiel par semaine a repris pour les étudiants en pharmacie : « même si c’est sous une blouse, des lunettes et un masque, je suis heureux d’enfin voir des être humains ». Alors peut-être qu’à un mois de la fin d’année, les universitaires vont enfin apprivoiser leur nouveau territoire de vie et sortir de leur solitude.
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