Reportage – Une après-midi auprès de la restauratrice de tableau Valérie Siméon

C’est dans son atelier d’artiste, situé à Garches en banlieue parisienne, que Valérie Siméon s’attelle à la restauration de tableaux. Cette mère de trois enfants a depuis toujours un attrait certain pour le milieu de l’art, plus particulièrement de la peinture. À quinze ans déjà, une exposition au Grand Palais intitulé « La vie secrète des chefs d’œuvre » lui donna envie de découvrir l’envers du décor, en l’occurrence l’envers de la toile. 

Il est 14 heures à Garches, lorsque le lundi 22 mars, Valérie Siméon entame la restauration d’une huile sur toile du XVIIIème siècle. En imbibant un long coton-tige d’acétone, elle se souvient du début de carrière. Car ce n’est qu’après seize ans dans l’industrie pharmaceutique, en 2006, que Valérie décide de changer de milieu. Elle commence alors une formation professionnelle de quatre ans à l’Atelier du Temps Passé dans le 12ème arrondissement de la capitale. Les débuts furent un peu compliqués, il lui fallait se faire un nom dans le domaine de la restauration de tableaux. Mais ses efforts ont finalement payé. Depuis 2019, Valérie voit sa clientèle grandir, principalement par le biais du bouche-à-oreille.

« Une sorte de communion avec le peintre et son œuvre »

Ce 22 mars, Valérie s’attèle à l’allégement du vernis de la toile, qui a jauni avec le temps. C’est un travail minutieux, qui prendra plusieurs heures, à passer de légers coups de coton-tige sur la toile.  Face à elle, le visage d’un vieil homme courbé au crâne dégarni. Le contraste de couleurs entre la partie allégée et celle ayant encore l’ancien vernis est flagrant. Le procédé d’allègement permet de faire renaître le tableau, de retrouver les détails peints par l’artiste. Des heures durant, Valérie fait donc face à ce visage de vieil homme qu’elle découvre un peu plus après chaque coup de coton-tige. « C’est une sorte de communion avec le peintre et son œuvre. Je passe de longues heures à travailler sur un tableau, je l’observe sous tous ses angles, je suis en tête à tête avec lui. J’ai l’impression d’entrer dans la toile au bout d’un moment. » confie-t-elle, sans décrocher son regard de la toile. 

Mais le moment que préfère Valérie, c’est lorsque le client découvre le tableau restauré. Valérie se souvient ainsi d’une cliente qui avait pleuré à la vue de la restauration effectué. C’était une toile représentant un paysage à Saint-Adresse où elle allait régulièrement avec sa grand-mère. Le tableau avait retrouvé ses couleurs, et la cliente retournait au temps où elle se baladait face à ce panorama aux côtés de son aîné. 

Un sentiment de solitude qui pèse

Mais ni le contact avec le client au moment du rendue du tableau, ni l’entrevue avec la toile et son artiste ne suffisent à éloigner le sentiment de solitude qui prend Valérie lors des restaurations. Seul le chant des oiseaux perchés aux arbres de la résidence vient troubler le silence qui règne dans l’atelier. De nature sociale, Valérie regrette la solitude du travail de restaurateur de tableau. Certes, elle donne depuis 2019 des cours à l’Atelier du Temps Passé qui l’avait elle-même formée. Mais la Covid et le passage en distanciel des cours ont ôté tout ce qui faisait l’intérêt de ces cours. Elle garde cependant les contacts qu’elle avait noué avec ses étudiants avant la crise. Une d’elles vient même régulièrement travailler à ses côtés à l’atelier, depuis qu’elle a effectué un stage avec Valérie l’an passé.

L’impact positif de la crise sanitaire

Après un certain nombre de cotons tiges, Valérie sort son téléphone portable pour photographier le tableau, plus précisément le contraste entre la partie retravaillée et la partie d’origine. C’est durant le seconde confinement que Valérie a créé ses comptes sur les réseaux sociaux (Instagram, Linkedin, Facebook), épaulée par sa fille Philippine. Depuis, Valérie sent une croissance dans son activité, mais comment savoir si les deux sont réellement liés ? Car parallèlement à la création de ses comptes sur les réseaux sociaux, la crise sanitaire a aussi été une source de croissance du secteur de la restauration de tableau. « Durant le premier confinement, les gens enfermés chez eux ont eu le temps de se reconnecter avec leur intérieur, avec leur héritage. Ils ont fait attention à ce qui les entouraient aux quotidiens, notamment leurs tableaux, et ont souhaité en prendre soin. » analyse-t-elle. Un peu de positif donc, dans le sombre tableau laissée par la crise sanitaire. 

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