Le mardi 11 janvier 2022, huit personnes se rassemblent dans une salle de l’espace Vasarely, dans la ville Antony. Les élèves sont là pour apprendre le français au cours d’un atelier de conversation. Ils sont iranien, algérien, indonésien, mexicain et brésilien. Ils sont pour certains des inconnus à s’asseoir autour d’une table, dans un pays dont ils ne parlent pas couramment la langue. Encadrés par deux intervenantes, ils conversent entre eux pendant deux heures pour améliorer leur niveau de Français.
Installation et préparation :
Il est 19h30, les intervenantes de l’atelier s’activent en attendant l’arrivée des premiers élèves. Il s’agit de rassembler les chaises autour d’une table et d’installer le jeu. Pour la séance de ce mois-ci, le thème est la « fête ». En effet, en sortie du Nouvel An et de Noël, le choix semble tout trouvé par la présidente de l’Association Français Pour Tous à Antony, Marie Pierre Bacos. Elle espère que le sujet intéressera les élèves et qu’ils pourront trouver les mots pour en parler. Les minutes passent, allant jusqu’à dépasser l’horaire fixé du début du cours. L’inquiétude grandit : et s’ils ne venaient pas ? Les volontaires se sont inscrits sur une plateforme pour marquer leur présence, mais le virus du Covid-19 a bouleversé les habitudes. Les cas contacts, le pass sanitaire et les tests positifs de dernière minute ont limité les activités de l’association.

L’espace Vasarely de la ville d’Antony accueille l’atelier conversation
https://www.ville-antony.fr/espace-vasarely
Il est 19h38, soulagement chez les intervenantes, un groupe de trois adultes arrivent dans la salle, dissimulés sous leur manteau d’hiver. Ils ont entre 30 et 50 ans. Ils paraissent tous sortir de leur journée de travail. Ils tiennent encore avec eux leurs affaires de la journée. Le groupe n’est pas encore complet, mais les élèves s’empressent de s’asseoir et de demander le sujet du jour. La présidente leur donne, ils paraissent intrigués. Dans l’attente, la séance commence par une courte présentation des gens dans la pièce. Chacun dit son prénom, son nom, sa nationalité. Ils complètent leur présentation par quelques questions entre eux. Ils ne se connaissent pas. Ils se rencontrent peut-être pour seule et unique fois à cet atelier de conversation. Ils essaient d’en apprendre plus les uns sur les autres tout en pratiquant le Français.

La présidente veut créer un climat convivial pour mettre à l’aise les élèves. Il faut encourager les plus timides et convaincre les élèves dont c’est la première séance. Les derniers participants arrivent et s’installent aux dernières places libres. On compte autour du plateau de jeu six élèves et deux intervenantes. Le cours peut commencer.
Lancer les dés :
La présidente établit les règles. Il s’agit d’un jeu de l’oie spécial fête. Les participants lancent chacun leur tour les dés et tirent une carte. Ils peuvent tomber sur une carte quizz ou sur une question réflexion. Tous les élèves jouent avec le même pion. C’est là, la règle principale : pas de compétition. Ils sont là pour apprendre en s’amusant et pour partager un moment. Un premier s’élance et tire les dés : 6. Il rit et fait avancer le pion sur les cases pour arriver sur celle du puits. Dans un fou rire général, l’équipe est obligée de recommencer depuis le début. C’est au tour d’un deuxième participant. Le dé roule et s’arrête sur la face 4. Le jeu peut enfin débuter.
Le joueur tire une carte et la lit. Tous sont attentifs, essaient de comprendre la consigne en français. Le joueur lit deux fois la carte et articule autant qu’il peut chaque mot. Elle est ensuite passée aux autres joueurs. La carte explique que chaque personne doit proposer un plat pour constituer un menu de fête. A tour de rôle, les joueurs prennent la parole et expliquent leur choix. Ils essaient de trouver les mots justes pour décrire au mieux leur réponse.
Les autres écoutent très attentivement. Ils posent des questions pour plus de précisions : « ça se cuisine comment ça ? » demande un premier participant ou « Vous arrivez à cuisiner ça aussi en France ? » s’interroge un deuxième. Le menu est partagé entre le couscous algérien, la tequila mexicaine, la dinde à l’orange du Brésil, le poisson aux plantes de l’Iran. La présidente ajoute la bûche française pour le dessert.

Apprendre le Français, c’est le pratiquer :
L’atelier se construit par et pour les participants. Les intervenantes sont là pour les encadrer et permettre la libre circulation de la parole. Les élèves font des erreurs de grammaire, de conjugaison, de formulation, mais cela ne semble pas avoir d’importance. Elles ne sont que rarement corrigées. Il s’agit de pratiquer. L’écoute et la bienveillance règnent dans la pièce. Un élève cherche parfois un mot et demande sa traduction. Mais il trouve souvent une alternative en montrant sur son téléphone portable une photo. D’autres prennent des notes sur un cahier pour ne pas manquer un mot inconnu.
L’atelier se rythme par les questions du jeu et les anecdotes des élèves, ce qui ne manque pas de les faire rire. Les différences culturelles sont regardées avec curiosité, mais non-jugées par les élèves. Un homme d’origine brésilienne raconte devoir faire trois résolutions pour les trois premières vagues qu’il voit à la nouvelle année. Sa voisine s’interroge : « Vous faites ça aussi en France ? ». Il répond que le fleuve de Paris, la Seine ne fait pas de vague. Cela l’empêche de formuler ses vœux. Les élèves rient.
Témoignage d’un participant:
Karim, 30 ans partage cette atmosphère peu formelle qui selon lui est plus enclin à lui faire apprendre le Français : « on peut apprendre facilement et plus rapidement ». C’est sa première séance, mais il dit vouloir se réinscrire pour la prochaine fois et pourquoi pas revoir des participants en dehors du cadre de l’atelier. Il ajoute que l’association présente un atelier unique à Antony qui lui permet de pratiquer. Il ne cache pas la nécessité pour lui d’améliorer son français notamment pour son travail. C’est là l’une des principales motivations des élèves. Ils veulent communiquer par le Français, mais également mieux s’insérer professionnellement.
La président de l’association ajoute à ces propos, que l’apprentissage et l’appropriation de la langue par des étrangers est « une véritable intégration ».
Par May Clogenson
Site de l’association Français pour tous à Antony : https://fpta.fr/
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