Dans les coulisses d’une distribution alimentaire menée par l’association RECUP

Le marché Edgar Quinet, 14ème arrondissementLe marché Edgar Quinet, 14ème arrondissement, (Léa Rocchiccioli)

Ce samedi 18 décembre 2021, l’association RECUP s’apprête à effectuer sa 15ème distribution alimentaire de fruits, légumes et produits frais. Créée trois mois plus tôt, son action se veut simple, faire la clôture des marchés du sud-est parisien, récupérer les invendus auprès des commerçants pour ensuite les distribuer aux personnes s’étant inscrites via le compte Instagram de l’association.

RECUPération des invendus

Aux alentours de 13h20, Ambroise Henry, le président de RECUP, Lisa et Bachir, deux membres de l’association, se rejoignent au marché Edgar Quinet, dans le 14ème arrondissement. Le marché touche à sa fin, le moment est propice pour que les commerçants acceptent de donner leur invendus. 

Chacun se charge d’une partie du marché et se présente au nom de RECUP. Cette petite association est connue des étudiants de l’université Paris-Sorbonne grâce au bouche à oreille. Elle est ouverte à quiconque souhaite devenir bénévole. L’ambiance est détendue. Bachir participe à une récolte pour la deuxième fois. Il confie être déjà à l’aise avec les membres de l’association. Le projet est né car ce sont souvent les fruits et les légumes que les étudiants peinent à acheter, et non les denrées non-périssables tels que les pâtes ou les conserves. 

Affiche de communication pour la distribution du 18 décembre, disponible sur le compte Instagram de l’association

Une récolte fructueuse

Certains marchands commencent à les reconnaître. Ils ont déjà mis de côté leurs invendus dans des cagettes. Ceux qui découvrent le projet sont agréablement surpris par l’initiative. 

En parallèle, une autre équipe est en train d’effectuer exactement le même schéma sur le marché Vincent Auriol, dans le 13ème arrondissement. Ils commencent vers 13h45, car les commerçants de ce marché ont tendance à donner un peu plus tard. 

« Dispatcher plusieurs équipes sur des marchés différents, c’est notre filet de sécurité », déclare Ambroise, le président de l’association. C’est un moyen d’assurer une stabilité aux récoltes car il se peut qu’un excellent marché soit très mauvais le samedi suivant. 

Bachir remplit le vélo cargo d’une cagette de tomates donnée par un commerçant (Léa Rocchiccioli)

Ce samedi, les produits sont très diversifiés. Les équipes ont récupéré plus de 10kg de pain, des pommes de terre rôties, des cagettes de tomates, de poires, de choux de bruxelles et de bananes. La récolte est de qualité. Mais beaucoup de fruits sont très mûrs ils devront être consommés très rapidement.

« L’acquisition du vélo cargo nous a permis de passer à la vitesse supérieure »

Il est 14h10, la récolte se termine. Se pose alors la question du transport des denrées récoltées jusqu’au lieu de distribution, l’esplanade Pierre Vidal, situé à 5,7km du marché. 

L’association dispose d’un vélo cargo, acheté grâce aux subventions versées par l’université Paris-Sorbonne. L’acquisition du vélo a été un véritable cap en terme de possibilité. 

Le véhicule a permis de récupérer beaucoup plus de légumes. Mais cela entraîne plus de travail pour les bénévoles, il faut faire le tri et  les pertes sont nombreuses. 

L’engin pèse plus de 200kg lorsqu’il est rempli. Seul le président de l’association est véritablement capable de le manier. Il se charge d’aller récupérer les invendus du marché Vincent Auriol. Les autres membres de l’association se rendent au lieu de distribution en métro. 

Suite à une crevaison, Ambroise répare la roue du vélo cargo (Léa Rocchiccioli)

Sur la route, Ambroise fait attention à ne pas aller trop vite. Mais en bas de l’avenue des Gobelins, il s’arrête et s’exclame avec le sourire: « Comme d’hab !». La roue avant vient de crever. Cet incident arrive souvent. 30 minutes sont nécessaires pour réparer la roue. Il arrive au lieu de la distribution à 14h50, le premier bénéficiaire arrive dans seulement 10min. 

« Ma bourse étrangère ne me permet pas de survivre à Paris, heureusement que RECUP est là »

A l’esplanade, 6 membres de l’association attendent impatiemment Ambroise. Dès son arrivée, ils déchargent le vélo à la chaîne et disposent les cagettes sur un long banc. Ce samedi 18 décembre, seuls 11 personnes se sont inscrites pour la distribution via le compte Instagram, contre plus de 40 au mois d’octobre. L’association explique cette baisse d’inscrits par le début des vacances de Noël. Les quantités distribuées par bénéficiaire seront plus conséquentes. 

La récolte du samedi 18 décembre, (Léa Rocchiccioli)

Un profil type de bénéficiaires se dégage. Sur 11 étudiants de l’université Paris-Sorbonne, 7 ne disposent pas de la nationalité française, vivent sur le territoire depuis moins de 6 mois et font face à des problèmes financiers. L’université propose aux étudiants à la recherche  d’une aide sociale de venir aux distributions de RECUP

« Cela me permet de vivre en attendant de m’adapter à la vie parisienne qui n’est pas facile », confie Sékou, étudiant en Master 2 de philosophie, originaire du Cameroun. En France depuis 3 mois, il peine à se nourrir correctement. Son loyer prend quasiment toute sa bourse étrangère, il paye 650€ pour une bourse de 800€. Les procédures administratives sont longues. N’ayant pas encore de sécurité sociale, il lui est impossible de trouver un job à côté. 

C’est le même cas pour Natacha, originaire de Russie, doctorante en architecture. Sa situation n’a fait qu’empirer avec la crise sanitaire. Son visa est expiré, la préfecture ne donne pas de réponse. Elle ne peut pas obtenir de petit boulot. 

Pour chaque bénéficiaire, Lisa confectionne un panier en s’adaptant au mieux aux besoins individuels (Léa Rocchiccioli)

Tout deux s’accordent sur l’importance de l’aide apportée par l’association RECUP. Ces distributions permettent aussi à des étudiants de classe moyenne de manger des produits frais plus souvent.

Aux alentours de 16h40, la distribution alimentaire touche à sa fin. Il reste énormément de produits frais. Ambroise va donner les restes à l’Agoraé, une épicerie sociale et solidaire créée par des étudiants, avec qui il a déjà collaboré. 

Léa Rocchiccioli

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