Le marché de Versailles constitue un pôle commercial très important pour la ville et ses alentours. Avec une large offre de produits proposée, durant les deux dernières décennies, le carré BIO s’est substitué au nom initial de carré à la viande attribué.
Comme tous les vendredis, dès 7 heures, Pascal, maraîcher, accompagné de sa fille Amandine, arrive du marché pour décharger ses produits. Les vendeurs arrivent dans la demi-heure qui suit, et aident à organiser les étalages. L’aménagement du stand est essentiel, car les produits sont nombreux, et tout doit être visible par les clients. Dès 7 heures et demie passée, les premiers arrivent et la matinée s’ensuit sans pause. La file d’attente s’allonge rapidement, malgré les quatre ou cinq vendeurs qui s’activent en continu.


Le nombre de clients ne diminue pas. Les fruits, légumes et œufs proposés sont tous labellisés issus de l’agriculture biologique, ou en cours de labellisation pour quelques rares produits. Ce n’est pourtant pas la concurrence qui manque, le marché de Versailles est très bien achalandé.
Les habitués matinaux
Malgré une augmentation générale des prix en France, les paniers achetés restent sensiblement similaires, avec une fidélisation de la clientèle très importante. Une part importante des consommateurs ont 60 ans passées, et sont acheteurs depuis l’arrivée du maraîcher sur le marché, il y a plus de vingt ans. Jean-Claude, 74 ans, fait partie des clients les plus matinaux : « Je n’achète jamais en quantité énorme parce qu’il n’y a que ma femme et moi. C’est un maraîcher, alors il faut s’adapter puisque les légumes proposés sont saisonniers, par exemple, en ce moment je commence un peu à me lasser des choux d’hiver, alors vivement les courgettes hein ! Et puis, moi j’aime bien retrouver à chaque marché ma petite équipe. Je vais sur le marché pour rencontrer des gens discuter. ». Il présente fièrement aux clients voisins les prénoms de chacun. Puis, comme chaque matin, il parle politique, en saluant de autres clients, qu’il surnomme « mes copains de droite ». Il emprunte Amandine – qu’il s’efforce tous les matins de convaincre de l’appeler Papou – pour aller prendre un café.
Les clients les plus matinaux sont toujours les mêmes, chacun a ses habitudes de consommation. Isabelle, mère de quatre enfants, vient chaque vendredi en vélo, et achète au minimum cinq kilogrammes pour chacun des produits : « Il faut mettre le prix oui c’est sûr, mais par exemple, moi qui achète en grandes quantités, à partir de 5 kilos, on paye moitié prix. Je trouve que le compromis est intéressant, même si tout le monde n’a pas toujours le monde suffisant à la maison pour acheter autant ».
Un nouveau type de client matinal s’est développé depuis la crise sanitaire, celui du père de famille cinquantenaire en télétravail. Clément en est un et explique : « Avant, je n’allais jamais au marché la semaine, mais maintenant comme je suis en télétravail le mardi et le vendredi, j’ai le temps de faire un saut tôt, avant que les réunions commencent ». Pascal a aussi gagné de nouveaux clients grâce au service de livraison à domicile qu’il a mis en place durant le confinement.
Une clientèle fidélisée
La relation entretenue avec les clients est essentielle, la plupart ayant vu grandir les enfants de Pascal depuis les débuts du stand, et sont aujourd’hui servis par eux. Par ailleurs, un contact se crée dans la file d’attente, au travers de discussions, échanges de recettes entre les gens.
Malgré des prix plus élevés qu’un primeur, le stand présente beaucoup d’avantages, comme en témoigne Jeanne. Pour l’achat de grosses quantités, le tarif est réduit. Pour un total supérieur à vingt ou trente euros (selon le vendeur), les centimes sont offerts. Des produits abîmés invendables sont donnés : des fruits talés, des légumes qui ont pris un coup de chaud. En été, des herbes en fonction de la période sont proposées, menthe, thym, persil ou coriandre. Pascal n’hésite jamais à offrir ou ne pas être très regardant sur le total exact à payer.

En plus d’une clientèle constante, le stand attire de nouveaux consommateurs. Ceux-ci saluent la qualité des produits proposés, et la considération accordée au prix est moindre comparée à celle du goût. C’est le cas d’Adèle, jeune maman, qui est revenue suite à premier achat : « Je voulais vous remercier pour vos produits, mon mari et moi avons enfin trouver des légumes qui ont du goût. On n’en pouvait plus d’acheter que des trucs fades ». Cette tranche de la clientèle est en partie issue de Paris, possédant un fort pouvoir d’achat. Le rapport qualité prix de Pascal est très avantageux comparé à celui de la capitale.
Des paniers de produits remplis mais variables
Le marché de Versailles constitue un marché privilégié, pour lequel les conséquences de l’augmentation des prix est moins visible qu’ailleurs. Il bénéficie d’une clientèle plutôt aisée, et la plupart peuvent se permettre de mettre le prix pour se fournir un produit de qualité. Pascal n’a pas augmenté ses prix à quelques exceptions près, et une partie des clients n’est pas très regardante de ceux-ci. Le panier moyen varie beaucoup selon chacun, souvent en fonction du nombre de personnes à nourrir, de la période, et de la fréquence. En retour de vacances, les paniers sont plus remplis, les veilles de fêtes, comme pour Pâques ou Noël. Ils se constituent des produits nouvellement arrivés dans la saison, comme c’est le cas pour les radis actuellement, ou pour les oignons nouveaux qui arriveront bientôt. Les poireaux, pommes, carottes et salades figurent parmi les produits qui sont le plus achetés.
La vente se fait aussi chaque samedi, sur l’exploitation à Beynes. La clientèle est locale et reste toute aussi fidèle. Étant donné qu’un seul marché a lieu pour eux, les paniers sont plus conséquents qu’à Versailles. Des paniers pour les membres de l’AMAP, Association pour le Maintien de l’Agriculture Paysanne sont préparés. Chaque semaine, Pascal s’engage à fournir à chaque membre un panier de fruits et légumes de saison de sa production. En échange, ceux-ci cotisent pour être adhérent.
Ingrid Gallois