A Dakar, mieux vaut s’accrocher pour suivre la frénétique cadence des modes dansantes. Pas un mois ne se passe au Sénégal sans qu’une nouvelle chorégraphie envahisse les réseaux sociaux, grâce aux jeunes, colporteurs numéro un de rythmes enflammés.

Connaissez vous le « Kone Yess Challenge » ? C’est l’une des danses qui fait fureur ces jours-ci au Sénégal. « Noy Moyto sa nooneu, kone yess ». Littéralement, en wolof : « Comment combattre tes ennemis, donc oui ». La chorégraphie du moment fait le tour des réseaux sociaux. YouTubeurs, comédiens et jeunes se filment à la maison, dans la rue, dans leur commerce. Presqu’une routine au Sénégal.

Du « ndaga » au « kone yess challenge »

Car avant le « Kone Yess » ce fut le « Snaps Chat », le « Na Gooré », le « Tak si rip » , le « Youza » ou dès les années 1960 le « ndaga », autant de déclinaisons du mbalax, le courant musical et chorégraphique le plus populaire au Sénégal.

D’où vient cette fièvre créatrice ? Elle est d’abord l’expression d’une vraie culture de la danse. Au Sénégal, on danse à chaque étape de la vie : aux baptêmes, dans les cérémonies religieuses, aux mariages. Les femmes entretiennent jalousement ce patrimoine, lors des sabar et tanebeer (« bal de nuit » en wolof), des fêtes exclusivement féminines – à l’exception des percussionnistes – et des espaces de transgression.

Mais la danse, c’est aussi un art du quotidien, à la maison, au travail, pour bercer les enfants, séduire son amant, se taquiner entre amis. Loin d’être l’apanage de la tradition, elle ne cesse de se renouveler.

A chaque mois sa nouvelle danse, lancée par un chanteur, une danseuse ou un lutteur, diffusée ensuite comme une traînée de poudre par la jeunesse connectée. YouTube regorge de vidéos avec des titres comme « La nouvelle danse qui fait fureur au Sénégal » ou « La danse qui fait le buzz ».

La danse, miroir de la société sénégalaise

Drôles, politiques, sensuelles, voire sexuelles, ces nouvelles chorégraphies racontent la société sénégalaise : sa gastronomie,  sa politique, ses regards sur les corps.

En filigrane, ces danses traduisent la créativité de cette jeunesse et de ses « ingénieurs spécialisés en danse », comme les appelle l’artiste Xuman dans son journal rappé.

Des danses pourtant maintes fois accusées de dénaturer la tradition, les valeurs et les moeurs sénégalaises. Pourtant, ces chorégraphies, sans cesse réinventées, partagent bien la fonction première de la danse, « faire communauté ».

Charlotte Lalanne

 

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