C’est la plus jeune députée. A 33 ans, Aminata Diao fait partie de la majorité parlementaire depuis son élection en 2017. Diplômée en administration des entreprises, cette fille d’enseignants de la région de Velingara (Casamance) se bat pour l’émancipation des femmes et le développement du monde rural.

Comment êtes-vous entrée en politique ?

J’ai commencé durant ma deuxième année à l’université Cheikh Anta Diop de Dakar. J’appartenais déjà au comité de soutien de Macky Sall lorsqu’en 2008 il a fondé son propre parti, l’Alliance pour la République (APR). Au sein de cette nouvelle formation politique, j’ai été nommée présidente de la commission féminine de la section étudiante. Quand Macky Sall a été élu président en 2012, je venais d’être diplômée, j’étais un peu jeune pour me présenter. En 2017, j’ai été élue.

Pourquoi avez-vous choisi cette voie très jeune ?

Avec quatre anciens parlementaires, nous avons une longue tradition de l’engagement politique dans ma famille. Jeune fille, à chaque fois qu’on me demandait ce que je voulais faire plus tard, je répondais toujours « députée ». Médecin ? Enseignante ? « Non, non, députée. » J’ai toujours voulu être au service des populations, de ma communauté et surtout des femmes. Quand j’ai été élue, mes amies ont pleuré. Mon rêve se réalisait. Je fais de la politique par conviction et souhaite d’ailleurs être réélue.

En quoi consiste votre travail au sein de l’Assemblée nationale ?

Je participe aux travaux de l’Assemblée, c’est-à-dire au vote des lois et du budget de l’État, au contrôle de l’action du gouvernement et à l’évaluation des politiques publiques. Les doléances des populations de mon département, dans la région de Velingara, en Casamance, où je me rends une à deux fois par mois, constituent également une grosse partie de mon travail. Je suis déterminée à contribuer au développement de ma région et de mon pays. Mais ce qui me prend le plus de temps, ce sont les travaux en commission et en séance. Pendant deux mois, il arrive que l’on reste assis de huit heures à minuit chaque jour, donc c’est assez fatigant.

A l’Assemblée nationale du Sénégal, siègent 165 députés. Photo : Alexandre Chauveau.

Comment vivez-vous le fait d’être la plus jeune députée de l’Assemblée ?

On m’appelle souvent la thiat (« benjamine » en wolof). C’est un honneur et une fierté. Mais ça ne change pas ma manière de travailler. Quand j’ai quelque chose à dire, je le dis. Je dois prouver que, malgré mon âge, je peux participer à la bonne marche du pays. Et j’apporte mon dynamisme ! J’ai également la chance d’avoir des collègues plus expérimentés, j’apprends beaucoup à leurs côtés. Certains députés ont 60 ans, voire 70 ans, mais il y a aussi des députés moins âgés. Depuis l’élection de Macky Sall, les choses ont changé. Quand il a choisi lui-même ses candidats aux législatives, il a pris beaucoup de jeunes.

Quels combats politiques menez-vous ?

Je suis très engagée dans la cause féministe. J’organise des meetings ou des sessions de formation, par exemple. Au Sénégal, la tradition veut que les femmes restent à la maison. Elles obéissent à leurs maris et sont en retrait. Aujourd’hui, les choses évoluent. La loi sur la parité a été votée. Nous sommes présentes dans les instances de décision et étudions autant que les hommes. Mais en milieu rural, les femmes ont besoin d’un financement pour s’émanciper et vivre de leur activité. Sinon, elles dépendent financièrement de leurs maris. Mes origines jouent sans doute un rôle important dans ce combat. Avec des parents enseignants, j’ai grandi en voyant une mère indépendante. J’ai envie de montrer cette voie. Moi-même, je suis mère de deux enfants, je travaille et je m’adapte. L’Assemblée montre aussi l’exemple puisque qu’elle se compose autant de femmes que d’hommes.

Aminata Diao et son mari devant le portrait de Macky Sall. Photo : Alexandre Chauveau.

Vous incarnez la nouvelle génération. Selon vous, de quoi la jeunesse sénégalaise a-t-elle besoin ?

Les jeunes Sénégalais ont besoin d’emplois et de formations professionnelles. Beaucoup font des études longues, mais il y a trop peu d’emplois qualifiés à la clé. Pour l’artisanat et la maçonnerie, il n’y a aucun problème. Mais c’est plus compliqué de trouver un travail avec un niveau de diplôme élevé. Alors le Président Macky souhaite instaurer et développer l’apprentissage. Il a d’ailleurs créé un ministère à cet effet. L’autre thème qui me tient à cœur, ce sont les enfants, qui sont un peu négligés au Sénégal. Ils déambulent dans les rues en mendiant. Ça ne me plaît pas et le Président souhaite s’attaquer à ce fléau.

Vous venez également d’un département agricole. Comment agissez-vous pour les citoyens qui vivent de la terre ?

La situation est compliquée pour les jeunes agriculteurs. Ils ont besoin de semences, d’engrais et de matériel. Les difficultés sont parfois telles qu’elles poussent notre jeunesse à aller coûte que coûte en Europe, parfois clandestinement. Avec le Président, nous avons lancé un Plan Sénégal Émergent (PSE) qui aide financièrement ces jeunes à développer leur activité, comme l’apiculture ou l’aviculture.

Qu’est-ce qui a changé depuis l’élection de Macky Sall en 2012 ?

Notre président a fait le maximum pour combler les inégalités sociales. Par exemple, le monde rural était complètement oublié. Avant d’accéder au pouvoir, il a visité tous les recoins du pays, discuté avec tout le monde. En outre, il a beaucoup œuvré sur le plan sanitaire. Il a généralisé la couverture maladie universelle (elle n’existait que pour les fonctionnaires et les salariés des grandes entreprises, NDLR) et instauré des bourses familiales pour les familles les plus démunies. Certains foyers reçoivent jusqu’à 25 000 francs CFA d’aides sociales chaque mois. Enfin, avec le PUDC (Plan d’Urgence de Développement Communautaire), Macky s’est adressé au monde rural. Le plan a permis de construire des routes, d’édifier des forages, d’améliorer l’accès à l’eau potable. Et comme je l’ai déjà dit, la place de la femme est devenue plus importante dans la société. C’était là une priorité de son programme, qui s’est concrétisée pendant son mandat.

Propos recueillis par Aurélie Franc et Alexandre Chauveau

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