Depuis plus de 30 ans, Jean-René s’affaire autour des timbres dans sa boutique parisienne du IXe arrondissement, et a vu l’évolution de sa clientèle. Rencontre avec le commerçant en philatélie.
« Le collectionneur est une espèce en voie d’extinction ». Pour Jean-René Py la philatélie, avant d’être une passion, est une question de commerce. Lunettes carrées, chemise fantaisie, le négociant en timbres de 78 ans ne fait pas son âge.
Si le commerçant est à la retraite depuis plusieurs années, il donne toujours « un coup de main » à son fils qui a repris la boutique du 22, rue de la Fayette à Paris.
Officiellement nommée Société de Philatélie Languedocienne, l’entreprise est fondée au début des années 1960 à Toulouse par des commerçants occitans, avant d’être reprise comme affaire familiale par les Py en 1984. Le nom S.P.L. est finalement conservé, Jean-René ayant grandi lui-même à Montpellier.
Mais cet ancien ingénieur n’était pas préparé à faire carrière dans la vente de timbres. Après avoir rejoint la capitale pour des études en télécoms, il est conscrit en 1961 et fait ses classes en Algérie. Assigné aux transmissions, il restera de l’autre côté de la Méditerranée jusqu’en janvier 1963.
Quinze jours après son retour d’Algérie, il se marie avec, Liliane, elle qui l’a attendue pendant ses deux années de service. « Elle a été patiente » plaisante Jean-René qui adopte un air goguenard.
Et c’est avec le père de sa femme que le désormais ex-ingénieur apprendra le commerce des timbres.
« Les jeunes ne s’intéressent pas à la philatélie »
Pour autant, s’il apprécie l’objet, Jean-René n’est pas philatéliste lui-même : « C’est impossible à la fois de vendre et de collectionner les timbres » assure-t-il.
Lorsqu’on lui demande quel timbre passé entre ses mains il a préféré, Jean-René hésite puis nous évoque une série tirée des colonies françaises, du début du XXe siècle, la série dite « Palmiers ».
Mais pour ce qui est de l’aspect pécunier, le plus beau timbre qu’il a vu est sûrement le « n°7 », un timbre de 1850 très recherché par les philatélistes français, et dont la valeur peut atteindre 50.000€.
L’air désabusé derrière son comptoir, Jean-René déplore une certaine absence de renouvellement dans son public d’amateurs depuis plusieurs années. « Les jeunes ne s’intéressent pas à la philatélie, et nos clients sont quasiment tous des retraités », assure-t-il dépité.
Aujourd’hui les Py ont décidé de diversifier la boutique. Si la famille continue de vendre des timbres et du matériel de philatélie (la majeure partie de leur chiffre d’affaires), le fils qui reprend l’affaire a décidé d’ouvrir le commerce à la vente de figurines et de matériel pour des jeux de plateau, plus populaires chez un public moins âgé.
Quand trois touristes italiens rentrent dans sa boutique, Jean-René donne patiemment ses conseils pendant quelques minutes. Finalement ses visiteurs du jour choisissent de repartir avec une pochette de timbres de leurs pays, du début des années 1970.
Robin LEGRAND