
Cette année, les Jéco fêtent leur dixième anniversaire. Que retenir de ces dix ans ? Pour les invités de la séance d’ouverture, deux faits majeurs s’imposent sur le plan économique : la crise financière de 2007-2008 et l’accélération du numérique.
Il y a dix ans était lancé le premier iPhone d’Apple, marquant le début de l’ère des smartphones. C’était également l’explosion de la crise des « subprimes » aux Etats-Unis. Deux événements symbolisant la révolution numérique et la crise financière de 2007-2008, les deux thèmes principaux de la conférence « Regards sur les dix dernières années pour mieux anticiper le monde de demain ».
Des réponses contrastées à la crise financière
« La réponse à la crise financière a été bonne sur le plan économique, mais catastrophique sur le plan politique », juge l’économiste Jean Pisani-Ferry, professeur à la Hertie School of Governance à Berlin et professeur associé à Sciences-Po. D’après l’ex-membre de l’équipe de campagne d’Emmanuel Macron, « nous avons eu la chance d’avoir il y a dix ans des dirigeants économiques qui connaissaient l’histoire et qui ont répondu vite et avec intelligence ». A l’époque, les pouvoirs publics des pays en difficulté et les autorités économiques avaient mis en place des plans de sauvetage des banques en leur apportant de la liquidité, afin d’éviter que la crise ne s’aggrave. « Mais la grosse erreur sur le plan politique a été de ne pas dénoncer les coupables et de ne pas les punir », souligne Jean Pisani-Ferry.
Et même si la réponse économique à la crise a été bonne, la suite a été mal gérée selon l’économiste. « Dans le secteur financier, nous n’avons pas corrigé les modes de rémunération incitant au risque, regrette Jean Pisani-Ferry. Et puis nous n’avons pas non plus ramené la sphère financière à une taille qui correspond aux besoins de l’économie. Les talents sont très concentrés dans ce domaine, ce qui n’est pas socialement et collectivement utile. »
L’emploi impacté par la révolution digitale
L’accélération de la digitalisation constitue l’autre événement majeur de la décennie 2007-2017 pour les intervenants de la conférence. « A court terme, des études montrent que la révolution numérique détruit l’emploi », explique Philippe Aghion, professeur au Collège de France, contredisant ainsi ceux qui préfèrent parler de « requalification des emplois ». Selon les chiffres de France Stratégie, environ « 15% de la population est directement impactée par la révolution digitale, indique Michel Yahiel, commissaire général de l’institution publique. Mais selon d’autres études, jusqu’à la moitié de la population est concernée par ce phénomène. »
Pour faire face aux conséquences néfastes de la digitalisation sur l’emploi, il faut selon Michel Yahiel « investir dans la formation et l’enseignement supérieur ». Dans le grand plan d’investissement lancé par le gouvernement en septembre dernier, 15 milliards d’euros (sur 57 milliards) seront dédiés à la question des compétences et de la formation. Selon le commissaire général de France Stratégie, il faut diriger une partie de ces crédits vers les « 30% de la population active française ne maîtrisant pas les compétences de base (lire, écrire, compter, etc.) ». La solution « pour que les perspectives de la révolution digitale se transforment en opportunités et non pas en contraintes ».
Julien Da Sois