
Les globalisations naissantes de ces trois dernières décennies ont redistribué les cartes de la concurrence. Elle constitue un enjeu non négligeable pour les Etats. Ces derniers ont intérêt à collaborer tant les systèmes de production sont éclatés. Mais pour les intervenants des Journées de l’économie, ils doivent aussi créer des territoires plus compétitifs afin d’attirer plus d’emplois, et dynamiser leur marché. C’est tout l’enjeu de cette révolution technologique.
La table-ronde portant sur « Les métamorphoses de la concurrence » était l’occasion de cerner les mutations des dernières années, lesquelles ont modifié la donne dans les rapports entre les acteurs économiques, notamment les Etats.Plutôt favorable au consommateur, la concurrence n’est pas perçue comme quelque chose de positif entre les Etats. PourFlora Bellonne, professeur d’économie à l’Université Côte d’Azur (UCA), « les Etats ont tout intérêt à être partenaires ». Le raisonnement se fait plutôt en termes de conflits d’intérêts. Or, jusqu’à aujourd’hui, jamais ces conflits n’avaient été aussi importants. « Souvent, il y a une confusion entre concurrence et marché. La concurrence s’exerce dans un marché. Et les pays ouvrent de plus en plus leur marché. Ils s’élargissent, mais en même temps se fragmentent. Cela rend les secteurs compétitifs », signale François Lévêque, professeur d’économie à Mines ParisTech.
De nouveaux rapports de forces entre pays
Historiquement, la première mondialisation – qui correspond à la première révolution industrielle – a créé un conlit entre les gagnants de l’industrialisation et les grands perdants, tels la Chine et l’Inde. Les intervenants notent désormais une globalisation des firmes. Elles mettent en compétition des territoires, avec une localisation des chaînes de valeur complètement éclatées. « Pour chaque firme, on se demande quel territoire est le meilleur, en surveillant notamment les réglementations », argumente Pierre-Noël Giraud, professeur d’économie à Mines ParisTech et à l’université Paris-Dauphine. Un avis partagé par François Lévêque.
La révolution numérique a donc renversé la tendance dominante au XXe siècle, en créant de nouveaux types de concurrence. La première met en scène les pays industrialisés entre eux dans le but de maintenir les services d’innovation. La seconde concerne cette fois entre pays du Sud, concerne l’attraction des chaînes de production mondiale. La dernière renvoie « aux flux d’emplois entre les pays émergents et ceux industrialisés. Or on constate qu’elle tourne à l’avantage des premiers. Ils accueillent de plus en plus de travailleurs venus de tous horizons », explique Flora Bellonne.
Attirer les emplois nomades
C’est sur ce dernier type de concurrence que les intervenants se sont arrêtés. Tous militent pour que la France, et l’Europe de manière générale, attirent de grosses firmes dans le but d’augmenter les emplois dits nomades. « Ces emplois, engagés dans la production de biens et de services, et échangeables d’un territoire à l’autre, ont pour effet de dynamiser le marché autour duquel il s’installe. Généralement plus riches, ils ont un effet positif sur les emplois sédentaires, considérés comme plus pauvres. Mieux, pour 100 emplois nomades créés, vous entrainez la création de 66 emplois sédentaires », analyse Pierre-Noël Giraud.
D’où une compétition des territoires pour attirer les grands sièges sociaux ainsi que les centres de Recherche et de Développement. « Il faut que la France accroisse ses emplois nomades, qui seraient générés par des firmes »superstars ». Ce sont les chinois, les firmes des pays émergents qui vont venir les créer. Donc il faut les attirer ». Or à ce jeu là, la France affiche une baisse de 31 % à 27 % de ses emplois nomades. Une tendance qu’il va peut-être falloir revoir à la hausse au cours des prochaines années.
Romain Métairie.