
Des métropoles de plus en plus riches et des écarts de richesses de plus en plus importants au sein même de ces méga-structures. Le sujet était au coeur d’une conférence des Jéco, ce mardi. Les intervenants ont salué les initiatives d’acteurs locaux pour sauver l’emploi dans les quartiers défavorisés. C’est le cas, par exemple, dans les quartiers Saint-Michel à Montréal ou Saint-Jean à Villeurbanne.
« Les villes occidentales sont de plus en riches, accumulent de plus en plus de capital […] et pourtant il y a de plus en plus de d’écart de richesses, de mal logement, et des taux de chômage très importants dans certains quartiers », constate Cyril Kretzschman, consultant senior en entrepreneuriat solidaire de la Coopérative OXALIS. Avec 30 à 40% de taux chômage pour certains quartiers, le succès urbain des métropoles semble s’être transformé en échec humain.
Selon Catherine Feuillet, consul de France à Montréal : « Les grands acteurs que sont les Etats ne peuvent seuls apporter des solutions. » Avant d’ajouter : « La coopération internationale passe par les acteurs locaux ». Des initiatives à petite échelle émergent en réponse à cette incapacité.
« On ne pouvait pas ignorer la situation économique du quartier »
A Montréal, le quartier Saint-Michel concentre une population en difficulté. Seuls 19% de ses habitants possèdent un diplôme universitaire, contre 40% sur l’ensemble de la métropole en 2016. Il s’agit d’une population jeune, largement immigrée, et c’est dans ce quartier que l’organisme à but non-lucratif TOHU a choisi de s’implanter.
Fondée il y a quinze ans, l’association culturelle d’arts du cirque a placé dans ses objectifs celui de revitaliser ce quartier. « On s’est dit, oui, on va développer les arts du cirque mais on ne peut pas ignorer la situation économique du secteur » , raconte Stéphane Lavoie, directeur de la TOHU, maison du cirque et gestionnaire du parc urbain de Saint-Michel. Et d’ajouter :« On devait aller plus loin qu’être une maison de la culture pour le quartier. On a donc décidé que tous les employés ayant un lien avec le public seraient des gens du quartier ». Même s’ils ne possèdent pas a priori les compétences. Il résume : « On embauche par le code postal, et après on les forme. »
Un territoire zéro chômeur
Plus près de nous, à Villeurbanne dans la métropole lyonnaise, un projet a vu le jour, construit autour de la conviction que le chômage de longue durée coûtait cher à la collectivité. « A hauteur de 43 milliards d’euros par an » chiffre Agnès Thouvenot, adjointe au maire. Le quartier fait face à un taux de chômage extrêmement important, proche de 25%. « L’idée a donc été de réaffecter le coût du chômage de longue durée à la création d’entreprises qui vont elles-mêmes salarier les personnes sans emploi » , explique-t-elle.
Dans le cadre de la loi d’expérimentation Territoire Zéro chômeur, l’entreprise Emerjean a ainsi été fondée en mars 2017 pour employer les personnes volontaires, en situation de chômage de longue durée du quartier. « Aujourd’hui elle compte 77 salariés et il y en aura 85 d’ici la fin de l’année ». explique Agnès Thouvenot. En terme d’activité, l’entreprise répond aux besoins non-assumés du territoire, à la fois en terme de services à la personne (soutien scolaire, accès au bio…) que d’activités supports pour les PME et TPE du quartier, souvent trop chers pour les acteurs locaux. Des services à petit coût, « solvabilisés avec l’économie sur le coût du chômage de longue durée » assure l’élue de Villeurbanne. Avant d’ajouter : « Mais cela reste avant tout une entreprise tremplin pour les salariés, vers d’autres emplois. »