CICE: un bilan décevant

A partir du 1er janvier 2019, le CICE sera transformé en allègement de charges.

La fin de l’année approche et avec elle, celle du Crédit d’impôt compétitivité emploi (CICE). Les intervenants de la table ronde « Compétitivité : handicap majeur de l’économie française » sont revenus sur le bilan décevant de ce dispositif mis en place en 2013.

26 milliards d’euros. Voilà ce qu’a coûté le crédit d’impôt compétitivité emploi (CICE) à l’Etat l’année dernière. Mis en place en 2013, ce dispositif accorde des réductions d’impôts aux entreprises sur les salaires inférieurs à 2,5 fois le SMIC. Le but : relancer la création d’emplois et surtout améliorer la compétitivité des entreprises françaises. A l’heure du bilan – le CICE sera transformé en allègement de charges le 1er janvier prochain – les deux objectifs sont loin d’être remplis.

Et tout d’abord en ce qui concerne l’emploi. « Le comité de suivi estime que le CICE a pour le moment permis la création ou la sauvegarde de 100 000 emplois entre 2013 et 2015 », affirme Vincent Aussilloux, directeur du département économie de France Stratégie. Et l’effet pourrait être plus important selon cette même institution. Pour en être sûr, il faudra attendre les données définitives des années 2016 à 2018. Toujours est-il que l’on est bien loin du million d’emploi promis en 2013 par Pierre Gattaz, alors à la tête du Medef, en contrepartie du CICE et du pacte de responsabilité.

Et les résultats concernant la compétitivité des entreprises françaises ne sont pas meilleurs. Ils sont même moins bons. « Les parts de marché du pays se sont stabilisées mais l’impact du CICE n’est pas évident », ajoute l’économiste. Le dispositif n’a pas su enrayer la perte de compétitivité française notamment liée à un coût du travail trop élevé dans le pays.

Un instrument pour deux objectifs, ça ne marche pas en économie

Comment expliquer cet échec ? « Le problème, c’est que l’on a un instrument pour deux objectifs », explique Vincent Vicard, économiste au Centre d’études prospectives et d’informations internationales (CEPII).

« Pour relancer l’emploi, les baisses de cotisations sociales ont été ciblées sur les bas salaires. Or, les salariés qui touchent ces rémunérations ne travaillent pas dans les industries la plupart du temps », poursuit le chercheur. Le CICE peut donc avoir un effet sur l’emploi. Mais sur la compétitivité des entreprises qui exportent des produits manufacturés, c’est plus compliqué : le coût du travail ne baisse pas dans celles-ci.

Des effets sur la compétitivité à moyen-terme ?

Une autre explication, complémentaire, est liée à la façon dont les entreprises se sont servies du CICE. « Elles l’ont utilisé pour se désendetter », précise Sarah Guillou, directrice adjointe à l’Office français de conjoncture économique (OFCE). Le crédit d’impôt a donc permis aux entreprises de rétablir leurs marges… au détriment des objectifs fixés par l’Etat : elles n’ont pas utilisé cet argent pour investir – et donc améliorer leur compétitivité – ou embaucher.

Mais attention à ne pas tirer de conclusions trop hâtives. « Ayant rétabli leurs marges, les entreprises sont désormais en mesure d’investir et d’améliorer leur compétitivité hors coût, c’est-à-dire investir pour améliorer la qualité du produit exporté plutôt que réduire les coûts pour baisser son prix », ajoute Sarah Guillou. Des effets que l’on n’observe pas pour le moment.