Les villes face à la guerre des talents

A Lyon, l'écoquartier Confluence. Aujourd'hui, les villes peinent à recruter pour développer les agglomérations durables de demain. Crédit : Elodie Vilfrite

A l’instar de nombreux secteurs de l’économie, le recrutement est aussi un problème majeur pour les territoires. Leur objectif : trouver du personnel qualifié, au moment où les grandes villes, à l’heure du numérique et du développement durable, sont contraintes de s’inventer de nouveaux modèles. Illustrations de ce phénomène avec Montréal et Lyon.

« A Montréal, nous sommes face à une pénurie. Tous les secteurs d’activité de l’administration sont touchés et ça risque de s’aggraver. Selon nos projections, d’ici à 2025, un quart de la main d’œuvre employée par la ville partira à la retraite. Il est urgent d’assurer la relève. » Ce constat, c’est celui de Josée Lapointe, directrice des ressources humaines de la ville de Montréal.

En plus de ce choc démographique, la région connaît le plein-emploi. Une situation qui n’arrange pas les choses mais qui ne suffit pas à expliquer ce manque criant de candidats. Car à Lyon, les conclusions sont similaires. Recruter du personnel au sein des administrations publiques territoriales est un casse-tête.

Le défaut d’attractivité de ces entités explique en partie le phénomène. « Dans l’imaginaire collectif, travailler pour une administration, n’est pas excitant », résume Dany Saint-Laurent, en charge des stratégies ressources humaines de Montréal. La ville est pourtant le premier employeur de la région métropolitaine avec 28 000 postes.

Au-delà de cette histoire de perception, c’est aussi la question des salaires qui pèche. « On ne peut pas s’aligner sur les grilles du privé, c’est incontestable », explique Pierre Houssais, directeur de la prospective et du dialogue public de la métropole du Grand Lyon.

Car en effet, ce sont les professions à haute valeur ajoutée — et donc, bien rémunérées — qui sont recherchées par les villes. Des métiers notamment liés au numérique et à l’innovation. « Concrètement, 50% de nos ingénieurs en travaux publics viennent de l’étranger. C’est l’une des stratégies que l’on met en place pour combler les besoins », illustre Josée Lapointe.

A la difficulté de recruter du personnel qualifié s’ajoute un élément essentiel : le trop faible échantillon de personnes effectivement compétentes dans ces secteurs de pointe. C’est là que l’université a un rôle à jouer. Selon Abderrahmane Rida, vice-recteur de l’agence universitaire de la francophonie, « les universitaires doivent ajuster leurs formations pour répondre aux enjeux des villes, préparer les futurs cadres dont les administrations  locales ont et auront besoin. » Une direction qui implique nécessairement plus de dialogue entre ces deux acteurs, un prérequis pour construire les villes intelligentes de demain.

Elodie Vilfrite