
Les tensions et les disparités entre l’Afrique du Sud et le Nigeria sont grandes. Sur le plan politique comme économique. Les conflits récurrents entre les deux géants africains sont un frein à la croissance du continent, les empêchant de jouer leur rôle de locomotive. Ce matin, une conférence des Jéco s’intéressait précisément aux moteurs de la croissance africaine.
En septembre 2019, une vague de violence xénophobe s’est emparée de l’Afrique du Sud, de nombreux commerces nigérians ont été saccagés et pillés. Les relations diplomatiques entre les deux superpuissances africaines _ si différentes sur bien des points _ se sont alors tendues.
D’un côté, le Nigeria, Etat pétrolier et pays le plus peuplé du continent avec 191 millions d’habitants, dont 20 millions à Lagos. C’est la plus grande ville d’Afrique. Une démographie qui fait donc du Nigeria le premier marché de consommation africain.
De l’autre côté, l’Afrique du Sud. Le pays le plus développé du continent avec un PIB de presque 369 milliards de dollars en 2018 selon la Banque Mondiale. Le pays exporte ses produits manufacturés dans toute l’Afrique.
Deux aires d’influences mitoyennes
« Les tensions politiques et économiques entre ces deux pays sont normales », explique François Bourguignon, professeur émérite à la Paris School of economics et ancien vice-président de la Banque Mondiale. Les deux pays sont assez proches géographiquement. Leurs aires d’influence politique et économique sont proches. « Cela crée des conflits et ce sont deux représentants de l’Afrique anglophone. Ils essaient de regrouper autour d’eux le plus de pays possible », ajoute-t-il.
Le Nigeria fait donc partie de la Communauté Economique des Etats d’Afrique de l’Ouest (Cédéao) alors que l’Afrique du Sud est le leader de la Communauté de Développement de l’Afrique Australe (CDAA). Mais ces deux zones d’intégration économique régionales pâtissent des intérêts des deux géants africains.
« Les unions douanières ne fonctionnent pas bien en Afrique car les intérêts nationaux sont souvent privilégiés », regrette François Bourguignon. Ainsi en août 2019, le Nigeria a fermé ses frontières pour protéger son économie mais a aussi mécontenté ses partenaires de la Cédéao.
Les échanges entre l’Afrique du Sud et le Nigeria s’élèvent à 4 milliards de dollars par an en moyenne. Malgré leurs différends, les deux pays savent qu’ils doivent commercer. L’Afrique du Sud a besoin du pétrole nigérian pour ses produits manufacturés. Et les entreprises sud-africaines sont bien implantées au Nigeria comme l’opérateur téléphonique MTN. Une entente plus cordiale entre ces deux géants serait certainement bénéfique à une Afrique de plus en plus tournée vers son marché intérieur et les échanges intracontinentaux.
Martin Pinguet