L’économie génère-t-elle de la violence ?

La violence et l'économie au coeur du débat de ce jeudi matin, aux Jéco de Lyon.

Au dernier jour des Jéco, quatre chercheurs ont livré leurs expertises sur les liens entre économie et violence. Leurs conclusions établissent des corrélations sur une variété de sujets et de territoires.

« Quand on parle d’économie et de violence, on peut penser d’entrée de jeu à deux conceptions : celle qui explique que l’économie réduit la violence et celle qui soutient au contraire qu’elle engendre de la violence. « , ainsi débute le modérateur Antoine Reverchon. Schématiquement, puisque l’économie créé des intérêts communs, on peut penser que ça limite les comportements violents. D’un autre côté, le capitalisme repose sur la propriété et sur une démarche de conquête des biens d’autrui, ce qui peut engendrer de la violence. Bref, l’enjeu n’est pas si simple à trancher. Les cas particuliers étudiés par les chercheurs permettent de tirer des enseignements concrets.

Marie-Claire Villeval, directrice de recherche au CNRS, a étudié l’économie comportementale de la violence. Elle a constaté que seules les émotions ne suffisaient pas à expliquer les comportements violents.  » Les symboles, les rapports de hiérarchie ou bien l’identité de groupe peuvent générer de la violence « , explique la chercheuse. Des observations qui fonctionnent dans plusieurs endroits du monde.

En Afrique, la question des chocs économiques liés aux ressources est cruciale pour Mathieu Couttenier : «  La présence et l’augmentation de la valeur d’une zone minière par exemple augmente la probabilité d’accaparement et de conflit. Dans les faits, entre 1997 et 2010, le prix mondial des ressources naturelles a été multiplié par trois. 25% des conflits en Afrique sont imputables à cela.  »

Dans la même zone, la situation sanitaire peut aussi être facteur de violences. « Après une épidémie de fièvre Ebola dans une zone, la violence s’accroît. Cela vaut d’autant plus dans les secteurs où la confiance dans les institutions est faible », déplore Elena Esposito de l’université de Lausanne.

Au Brésil et en Equateur cette fois, Paul Seabright s’est penché sur les liens entre violences conjugales et facteurs économiques. Il a constaté que, même s’il n’y avait pas de corrélation en soi entre niveau d’éducation et violences, les femmes plus éduquées avaient tendance à se mettre en ménage avec des hommes plus éduqués et moins violents. Il a aussi constaté que les femmes éduquées en concubinage étaient moins victimes de violences que les autres.

Elodie Vilfrite