
Trois mois après la publication du rapport Delevoye, la future réforme des retraites, débattue ce matin aux Jéco, fait l’objet de concertations entre le gouvernement et les partenaires sociaux. Plusieurs syndicats appellent à une grève interprofessionnelle le 5 décembre, mais pas de rétropédalage possible pour l’exécutif : le projet de loi sera examiné au Parlement d’ici à l’été 2020.
« Je n’aurai aucune forme de faiblesse ». Le ton est donné par Emmanuel Macron. Interrogé par RTL lundi 28 octobre, le président de la République entend « aller au bout » du projet de loi sur la réforme des retraites, quitte à se rendre « impopulaire ». Au départ prévu à l’automne 2019, l’exécutif a décidé de prendre le temps. Objectif : ne pas brusquer les Français et éviter une nouvelle crise semblable à celle des Gilets jaunes .
Projet de loi devant le Parlement à l’été 2020
Le 12 septembre, le Premier ministre Edouard Philippe dévoile le nouveau calendrier de la réforme des retraites. Il annonce la mise en place de « consultations citoyennes » de fin septembre à la fin de l’année 2019. Des échanges entre le gouvernement et les Français pour aboutir à l’examen du projet de loi après les municipales et avant la fin de la session parlementaire à l’été 2020.
Emmanuel Macron en personne participe à cette première consultation le 3 octobre à Rodez. Il assure que l’âge légal de 62 ans ne serait pas modifié et que « tous les droits acquis en 2025 [seront] conservés ». Il a néanmoins vanté les bienfaits de sa future réforme, sans renier les grandes lignes qui la composeront.

Cette réforme est le point phare du quinquennat Macron, une mesure au centre de sa campagne présidentielle de 2017. Il prépare déjà le terrain quatre mois après son élection. Le 14 septembre 2017, il nomme Jean-Paul Delevoye, ancien ministre de Jacques Chirac entre 2002 et 2004, haut-commissaire à la réforme des retraites.
Système à points
Dès lors, Jean-Paul Delevoye organise une consultation citoyenne pour dessiner les premiers contours du projet de loi. Après deux ans de travail et de concertation, le haut-commissaire aux retraites dévoile ses préconisations sous forme d’un rapport le 18 juillet dernier. Avec un objectif : construire « un système universel de retraites ».
L’exécutif bâti son projet de loi autour des préconisations de Jean-Paul Delevoye. Il redessine radicalement le système actuel : fin des 42 régimes spéciaux de retraite, remplacés par un régime universel qui accorde les mêmes droits pour tous, mise en place d’un système de retraite par points, qui remplace les années de cotisations.
Incitations à partir plus tard
L’âge légal de départ à la retraite, aujourd’hui fixé à 62 ans, n’est pas remis en cause. Mais Emmanuel Macron veut inciter les Français à travailler plus longtemps. Il propose l’établissement d’un âge pivot à 64 ans. Celui-ci serait régi par un mécanisme de bonus-malus : l’assuré subira une décote s’il part avant 64 ans, une surcote s’il part après.
Surtout, il supprime les régimes spéciaux, dont jouissent actuellement les salariés de la RATP et la SNCF par exemple. Plusieurs syndicats ont appelé à une grève interprofessionnelle le 5 décembre, les salariés de la SNCF et de la RATP appellent à une « grève illimitée à partir de cette date ». En 1995, le Premier ministre Alain Juppé avait dû se résigner à ranger sa réforme au placard, après trois semaines de manifestations et de grèves. Mais cette fois, le poids des syndicats semble trop faible pour faire plier le gouvernement. « La France de 2019 n’est pas exactement celle de 1995 » , a déclaré Edouard Philippe, hier matin sur BFMTV.
Irvin Blonz