Vit-on mieux en ville ou à la campagne?

Vit-on mieux en ville ou à la campagne?

Aujourd’hui, huit cadres sur dix se disent prêts à quitter Paris pour des villes moyennes ou petites, voire même pour la campagne. Stress, pollution, manque de grands espaces :  où est-on vraiment heureux en France ?

Plus de trois quarts des Français vivent en ville. Pourtant, un sur deux rêve de vivre à la campagne. Lors d’une conférence organisée au campus de l’école de commerce Inseec, des experts ont décortiqué les indicateurs de niveau de vie et de bien-être relevés selon le lieu de résidence. Premier constat, purement géographique : la part de communes rurales est en baisse (10% environ en 2015), alors que les périphéries de centres urbains attirent de plus en plus. Une des raisons : ce sont les grandes villes qui ont le plus augmenté leur stock d’emplois ces dernières décennies.

 

Mais c’est étonnamment dans les centres-villes que le niveau de vie est le plus faible. Or plus on va vers le centre des aires urbaines, plus le pourcentage de personnes couvertes par une ou plusieurs prestations sociales augmente. Il faut cependant relativiser ce constat : dans les zones rurales, les habitants sont nombreux à être propriétaires de leur maison ou leur appartement, ils touchent donc moins d’aides au logement.

 

Où est-on le plus heureux ?

Si les personnes habitant en zone rurale semblent légèrement plus heureuses, celles habitant en centre-ville se disent les moins satisfaites de leur vie et les moins heureuses dans leur commune. Selon une enquête du Cevipof, les habitants des communes rurales rattachées à de grandes aires urbaines (plus d’un million d’habitants) notent leur satisfaction de vie à plus de 7 sur 10. Les personnes vivant dans les centres villes de ces mêmes aires urbaines donnent, eux, la note de 6,6 sur 10.

On constate ainsi une certaine tendance à éviter le cœur des grandes agglomérations. Mais les villes moyennes ont la cote auprès des Français : 43% des Français disent vouloir vivre dans une ville moyenne (communes de 20 000 à 100 000 habitants), selon le Baromètre des Territoires. Elles concentrent pourtant un grand nombre de mécontentements des habitants, qui leur reprochent un manque d’accès aux services comme la santé, les transports ou les commerces.

 

Internet, télétravail… la révolution numérique change-t-elle la donne ?

Si le manque d’accès à une diversité de commerces était un véritable problème il y a quelques années, le développement du commerce en ligne a permis aux personnes vivant loin des grands centres urbains à avoir accès à une grande variété de produits sans bouger de chez elles. « Internet permet d’accéder à toute une gamme de biens et de services, c’est donc un égalisateur entre villes et campagnes », explique Alain Trannoy, directeur de l’Aix-Marseille School of Economics. « Mais d’autres services ne sont pas accessibles via Internet, comme les matchs de foot ou le théâtre, que les gens préfèrent consommer physiquement », continue-t-il. Le Japon a essayé de quantifier l’impact du gain de variété de services vie Internet sur l’indice de bien-être : il serait de 0,9%.

 

Faut-il déménager en périphérie ou à la campagne ?

Alors que les villes n’attirent plus – selon l’Insee, la part de la population dans les cent communes les plus peuplées diminue – et que les couronnes périurbaines gagnent de plus en plus d’habitants, faut-il fuir les aires urbaines à tout prix ?

« Pour les raisons environnementales que l’on connaît, l’objectif n’est pas du tout de faire déménager les gens à la campagne », commence Pierre-Henri Bono, chef de projet au laboratoire interdisciplinaire d’évaluation des politiques publiques de SciencesPo, et qui fait référence à la nécessité de prendre sa voiture pour travailler ou accéder à des services. « Il faut plutôt trouver des moyens pour que les gens des centres urbains se sentent mieux dans leur environnement », conclut-il. « Et vivre à la campagne ne signifie pas forcément vivre avec la campagne », ajoute Eric Chareyron, directeur prospective modes de vie et mobilité dans les territoires chez Keolis. « Si on vit à la campagne mais qu’on passe sa vie en voiture pour aller au travail et emmener les enfants à leurs activités, on ne profite pas de la nature, et cela ne rend donc pas plus heureux », explique-t-il.

Le bonheur serait donc plus dépendant du mode de vie que du cadre de vie.

 

Tiphaine Niederlaender

 

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