Le bien-être, nouvelle boussole des politiques publiques

Pour introduire la notion de bien-être dans ses statistiques, l'INSEE a crée le PIB ressenti.

Croissance ne rime plus avec bien-être. Indicateur privilégié par les économistes et les dirigeants depuis cent ans, le PIB est aujourd’hui invité à s’améliorer pour prendre en compte le bonheur des populations. Une thématique mise à l’honneur par la conférence des Jéco : « De la croissance au bien-être », jeudi 4 novembre.

Le PIB est cassé. Alors que pendant plus d’un siècle, la croissance s’accompagnait parallèlement d’une amélioration du niveau de vie, elle ne contribue, aujourd’hui, pas ou plus au bien-être de la population. Un constat partagé par les intervenants de la table ronde de ce jeudi matin qui ne souhaitent pas pour autant mettre cet indicateur à la porte. « Le PIB existe encore, et va exister pendant très longtemps, atteste Marc Fleurbaey, directeur de recherche CNRS, mais il est temps de passer de « l’avoir plus » au « mieux être. » 

Dans la lignée des recommandations de la Commission Stiglitz de 2008, les pays ont pris conscience que l’on ne « pilote pas un pays avec le nez fixé sur un seul indicateur », détaille Mathieu Perona, directeur exécutif de l’Observatoire du bien-être CEPREMAP. En plus de la production économique, la Commission érige la production humaine et la soutenabilité écologique en pilier de l’action publique. Ainsi, le bien-être devrait, non pas remplacer mais accompagner la croissance comme « boussole » des politiques publiques.

Un budget bien-être en Nouvelle-Zélande

Faire du bonheur des citoyens une priorité, c’est ce qu’a fait la Nouvelle-Zélande en se dotant d’un budget bien-être. 3,8 milliards de dollars néo-zélandais en 2020, soit plus de 2 milliards d’euros, dédiés « à la santé de notre population et de notre environnement », expliquait Grant Robertson, le ministre des Finances. Beaucoup plus proche de nos côtes, le Royaume-Uni a également fait du bien-être son cheval de bataille. En effet, le gain en bien-être est, de l’autre-côté de la Manche, une « métrique d’action et de priorisation budgétaire, complètement légitime, à la même hauteur qu’une réduction de la criminalité ou qu’une augmentation de la croissance », ajoute Mathieu Perona.

Mais en France, les énergies se sont concentrées autour de la création d’un nouvel indicateur : le PIB ressenti. De même que la température ressentie est plus à même de guider nos choix vestimentaires, ce récent outil vise « à corriger le décalage entre progression du PIB et évolution du niveau de vie perçue par la population », expose Jean-Marc Germain, conseiller du directeur général de l’INSEE. En l’appliquant aux États-Unis, on observe que même si le PIB de la première puissance économique mondiale a triplé depuis 1980, le PIB ressenti, « tel que l’INSEE l’évalue », stagne sur la même période. Grâce à ces données, les décideurs sont désormais en mesure de faire du bien-être une priorité dans la construction de leur action.

Chloé RABS