Urgence climatique : place à la démocratie participative ?

Les défis environnementaux, plus que jamais d’actualité, nécessitent d’inviter chaque acteur au dialogue. Parmi eux, le citoyen, qui malgré des initiatives démocratiques de plus en plus nombreuses, peine encore à s’imposer.

Le G20 la semaine dernière, la COP 26 actuellement : l’actualité prouve la prise de conscience des gouvernements pour répondre à l’urgence climatique. Depuis les accords de Paris, les objectifs sont précis, chiffrés et signés. Deux ans plus tard, l’heure n’est plus aux mots mais aux actions : « On a vraiment besoin d’un jeu de pression pour que les gouvernements et les entreprises fassent ce qu’ils se sont engagés à faire » souligne Laurence Tubiana, présidente et directrice Exécutive de la Fondation européenne pour le climat (ECF).

Le pouvoir du citoyen

Face à l’ampleur du défi écologique, tous les acteurs et tous les échelons doivent être mis à contribution : « On ne peut pas négocier avec le climat : ce n’est pas une transaction. Il est l’heure d’élargir l’espace politique », reprend Laurence Tubiana. Face à des engagements gouvernementaux jugés trop peu crédibles, la voix des citoyens se fait de plus en plus entendre. Ils poussent les dirigeants à faire évoluer la prise de décision, vers une démocratie plus participative. Pour la COP 26, 100 personnes – dont 18 Chinois, 18 Indiens, ou encore 1 Français – ont été tirées au sort pour débattre sur l’efficacité de l’action contre le réchauffement climatique. Leurs premières conclusions seront présentées dans les jours à venir. La France, sous l’impulsion d’Emmanuel Macron, s’est déjà essayée à cette démocratie plus participative lors de la Convention citoyenne pour le climat (CCC). Les résultats de cette concertation sont cependant apparus mitigés : sur 149 propositions, seule une soixantaine ont été retenues dans la loi Climat et Résilience. Bien que des progrès sont en cours, ils sont, pour les membres de la Convention, jugés encore trop timides : « La loi est insuffisante et ne donne pas un cap net. » 

Restaurer la confiance

Ce décalage entre l’apparente prise en compte de l’opinion publique et la réalité des politiques publiques ne permet aujourd’hui pas de lutter efficacement contre le dérèglement climatique selon Laurence Tubiana : « S’il n’y a pas de confiance entre les acteurs, on ne peut pas enclencher une coopération, pourtant vitale.» Une coopération qui semble en effet tarder à arriver, car au sein même de la population, le manque de confiance se fait là ressentir : « Les gens voient d’un mauvais œil la CCC : 70 % des Français pensent que des gens tirés au sort n’ont pas les capacités pour écrire les lois » constate Adrien Fabre, post-doctorant à l’ETH de Zurich. En effet, tirer des gens au sort pourrait garantir une diversité de représentants, à l’inverse des élections notamment, mais cela n’embarque pas l’ensemble de la population. « Ce mini public évolue, car les délibérations permettent de faire avancer le groupe vers une position commune. Le reste de la population, lui, ne fait pas ce chemin », remarque Floran Augagneur, vice-président de la Commission nationale du débat public (CNDP).

Jeanne BIGOT