Au Village des fiertés de Saint-Denis, la santé sexuelle priorité des associations locales


Le premier Village des fiertés de Saint-Denis avait lieu dimanche 16 octobre à la Bourse du travail.
Crédits : Pride des banlieues

Dimanche 16 octobre, le collectif la « Pride des banlieues » organisait le premier Village des fiertés à Saint-Denis, dans le but de créer une rencontre entre les associations LGBTQIA+ basées sur Paris et les collectifs locaux. Les militants souhaitent recentrer le discours sur certains enjeux liés à ces territoires périphériques, notamment sur la santé sexuelle.

« Depuis 2018, de jeunes militants qui habitent en banlieue nous ont ont rejoint et fait prendre conscience qu’il fallait qu’on décentre nos discours », reconnaît Marc-Antoine Bartoli, présent sur le stand d’Act’up Paris. Ce dimanche 16 octobre, dans le grand espace de la Bourse du travail de Saint-Denis, 28 associations, locales comme nationales, se sont réunies à l’appel du collectif la Pride des banlieues.

Fondé en 2017, les jeunes militants du collectif organisent un premier Village des fiertés, avec pour objectif d’inciter les grosses associations comme Act’up ou Aides à passer le périphérique et venir : « Discuter et échanger à Saint-Denis avec les autres acteurs de terrain », explique Axel Verdier, doctorant en sociologie, habitant de la ville et responsable du Pôle politique de la Pride des banlieues.

Les membres du collectif la Pride des banlieues accueillaient le public ce dimanche à la Bourse du travail de Saint-Denis. Crédits : Klara Durand

Les membres de la Pride des banlieues, originaires, pour la plupart, de Saint-Denis, souhaitent recentrer les discours sur des problèmes parfois mis de côté par les grosses associations parisiennes mais toujours d’actualité sur leur territoire. Notamment en ce qui concerne la santé sexuelle : « Historiquement, les luttes LGBTQIA+ partent des luttes contre le VIH ou le Sida. Or, la Seine Saint-Denis demeure un territoire extrêmement touché par le VIH, où le problème n’est pas réglé », insiste Yanis, le porte-parole.

En effet, au niveau des chiffres, ce sont 300 à 400 nouveaux cas de VIH qui sont détectés chaque année dans le département de la Seine-Saint-Denis. Celui-ci se place en deuxième position des départements les plus touchés en France métropolitaine, détaille le site de l’assurance maladie Amelie.fr.

Diagnostic du VIH en Seine-Saint-Denis (93) / Crédits : Klara Durand

D’autant que la population du département ne priorise pas la santé : « Sur notre territoire, les problèmes s’accumulent, les personnes vivent déjà quotidiennement la précarité et le racisme, la santé arrive après pour eux », constate Yanis.

Une communication inadaptée à la réalité des LGBTQIA+ des banlieues

Or, les grosses associations comme Act’up ou Aides basent leur communication sur d’autres thématiques, plutôt en lien avec les discriminations que subissent la communauté LGBTQIA+. Les affiches sur les stands, comme celle d’Act’up, le démontrent : l’association expose un dépliant ou s’affichent deux danseurs, un homme noir et un homme blanc, s’embrassant. Une communication souvent inadaptée à un public qui vit une autre réalité : « Les personnes LGBTQIA+ des quartiers populaires ne vont pas forcément se reconnaître dans les représentations du milieu gay qui leur parvient, par exemple, via un quartier comme le Marais à Paris », analyse Axel Ravier, tout en précisant : « Une représentation dont ils vont être, en plus, mis de côté, du fait de l’exclusion économique qu’ils subissent déjà et qui ne leur permet pas de rejoindre cet espace».


L’association Bameso va à la rencontre des membres de la communauté afrocaribéenne. Crédits : Pride des banlieues

Pour remédier à ces difficultés, les associations de terrain ciblent des tranches de la population précise, comme l’association Bameso : « Nous faisons des actions de prévention pour les personnes afrocaribéennes », explique Caroline Andoum, membre de l’association. Bameso organise régulièrement des ateliers communautaires de santé sexuelle pour sensibiliser les personnes en question, souvent « primo arrivantes » et qui se livrent « à de la prostitution, parce qu’elles ne parviennent pas tout de suite à obtenir les papiers pour rester sur le territoire », relate-t-elle. L’association va donc directement à leur rencontre « autour des tours, dans les cités ou les maisons de quartiers », afin d’apporter une prévention des maladies sexuellement transmissibles qui arrive souvent « trop tard », regrette Caroline Andoum.

Sensibiliser à la santé sexuelle en allant vers les populations mises de côté

A l’étage de la Bourse du travail, une campagne de vaccination contre la Variole du singe est également organisée par le département du 93, conjointement au Village des fiertés. Trois médecins se succèdent pour informer et vacciner les intéressés. Assit à une table, un jeune homme remplit une fiche pour indiquer ses informations sous les indications de Thomas Huleux, le médecin coordinateur. « De plus en plus on fait, nous aussi, du ‘’aller vers’’, on va directement voir des populations pour qui la santé ne passe pas au premier plan», rapporte ce dernier.

Les fonctionnaires et élus prennent conscience que la communication des grosses associations et antennes publiques ne parviennent pas forcément jusqu’aux populations des quartiers populaires : « Pour la variole du singe par exemple, le gouvernement est directement passé par certains canaux comme les réseaux sociaux des communautés LGBT », observe Thomas Huleux, tout en reconnaissant les failles : « Le problème c’est que les publics plus précaires des banlieues ne les suivent pas toujours».

Au total, en plus des associations présentes, une centaine de personnes ce sont déplacées au Village des fiertés pour venir découvrir les différents stands. L’élue Oriane Filhol, en charge de la lutte contre les discriminations à la Mairie de Saint-Denis, salue le travail essentiel de la Pride des banlieues : « Ils incitent de grosses associations historiques à venir dans en ville et c’est une vraie nouveauté». Elle prend pour exemple le cas de SOS homophobie qui, en 2022, a organisé pour la première fois sa journée annuelle de présentation de ses actions à Saint-Denis.

Pour en savoir plus :

https://www.pridedesbanlieues.fr/


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