Le Conseil d’administration de l’Université de Strasbourg a entériné le plan de sobriété proposé par son président, Michel Deneken, lors d’une assemblée générale organisée ce jeudi à 14 h. Une décision loin de faire l’unanimité chez les syndicats étudiants.
Le 19 septembre dernier, Michel Deneken a annoncé plusieurs mesures pour réduire les coûts de la facture énergétique de l’Université de Strasbourg en prévision de l’hiver à venir : une mise en route du chauffage plus tardive, le maintien d’une température de 19 degrés dans les locaux et, surtout, la fermeture des établissements pour deux semaines supplémentaires. « Une troisième semaine de congés de Noël début janvier et une semaine complète de cours en distanciel en février » seront mises en place, comme l’a détaillé Michel Deneken dans une vidéo postée sur YouTube à destination des étudiants.
Selon son président, cette dernière décision, inédite en France, doit permettre à l’université strasbourgeoise de faire face au « coût de l’énergie [qui] s’envole de plus en plus chaque jour » en économisant sur les dépenses d’électricité, de gaz et de chauffage. De 10 millions d’euros en 2021, celles-ci atteignent 13 millions d’euros en 2022. Le budget prévisionnel pour 2023 s’élève même à 20 millions d’euros.

Une initiative vivement contestée par la majorité des syndicats étudiants. À commencer par la Fédération des Associations Générales Etudiantes (FAGE), qui « s’oppose totalement à la fermeture des universités, car ce sont encore les étudiants qui vont payer les pots cassés », regrette son porte-parole Félix Sosso.
D’après la FAGE, cette clôture prolongée de l’université de Strasbourg risque d’accentuer les difficultés des étudiants les plus précaires, entre décrochage scolaire, fracture numérique, isolement social et dépenses domestiques alourdies.
« Ce n’est pas une décision réfléchie et il n’y a pas d’accompagnement des étudiants, déplore Félix Sosso. Fermer les universités provoque des suppressions de cours, perturbe les révisions, empêche la tenue de partiels… Le distanciel entraîne une rupture pédagogique car certains étudiants n’ont pas d’outils numériques à disposition. En plus, être isolé dans un logement CROUS pour étudier, quand on connaît les problèmes de santé mentale chez les jeunes, ce n’est pas souhaitable. »
Des craintes partagées par les syndicats radicaux Solidaires étudiant-e-s Alsace et SUD Éducation Alsace. Dans un communiqué commun publié le 19 septembre, les deux organismes ont fustigé la décision de Michel Deneken, accusée de favoriser une « rupture d’égalité pendant la période d’examens », une « dégradation des conditions de travail » et un « isolement des étudiant-e-s et du personnel dans une situation critique et précaire ».


Ce jeudi, en parallèle de l’assemblée générale du Conseil d’Administration de l’Université de Strasbourg, Solidaires organisait un rassemblement sur le campus universitaire pour protester contre une « mesure précarisante » et « opportuniste », qui serait avant tout destinée à faire des économies aux dépens des étudiants et du personnel. « La sobriété énergétique, elle a bon dos, confirme Félix Sosso, c’est une fermeture contrainte par des raisons budgétaires. »
La sobriété énergétique, elle a bon dos !
Félix Sosso, porte parole de la FAGE
Selim Azzi, secrétaire général de l’AFGES, un syndicat d’abord opposé à la fermeture prolongée de l’Université de Strasbourg avant d’entrer à la table des négociations, reconnaît que ce plan de sobriété « n’est pas une solution pérenne ». Et de poursuivre : « Si l’Université veut faire de réelles économies d’énergie, il faudrait que l’Etat engage une rénovation des bâtiments, car certains locaux sont des passoires thermiques. »
Michel Deneken et l’Université ont malgré tout engagé des discussions avec plusieurs acteurs, dont l’AFGES, qui n’est plus fermement opposée à ce plan. « On est vigilant sur le fait qu’il n’y aura pas de retour en distanciel, explique Selim Azzi, et on a négocié la mise en place d’une rémunération pour les étudiants démunis via le fonds d’urgence pour les étudiants de l’Université de Strasbourg, afin de limiter les dégâts. » Pas sûr que cela suffise à satisfaire tout le monde.
Alexis Kopp