Laisse béton : comment réduire l’empreinte carbone de l’industrie cimentière ?


L’industrie cimentière est responsable de 7% des émissions de dioxyde de carbone à l’échelle mondiale. Plusieurs solutions sont envisagées pour décarboner ce secteur tout en répondant à la demande croissante en ciment. Parmi elles, le projet FastCarb mène des recherches dans le recyclage des bétons et la création d’un béton « vert » recarboné.

Mardi 8 novembre, le Président Emmanuel Macron reçoit à l’Elysée les responsables des 50 sites industriels les plus polluants en France afin d’accélérer leur décarbonation. A eux seuls, ils sont responsables de près de 10% des émissions de CO2 nationales. Parmi ces gros pollueurs, des entreprises de cimenterie comme Lafarge, Calcia ou encore Vicat. 

D’après l’Association mondiale du ciment et du béton (GCCA), la seule production du ciment serait responsable d’environ 7% des émissions de CO2 à l’échelle mondiale. Or, la tendance étant à l’urbanisation dans tous les pays, le besoin mondial en ciment va croissant. Afin de décarboner l’industrie cimentière sans la saborder, plusieurs solutions innovantes sont envisagées. 

Une tonne de ciment pour 663kg de CO2 

La production de ciment, ingrédient principal du béton, est un processus doublement polluant. D’une part, les fours des cimenteries ont recours à des combustibles fossiles pour fonctionner, ce qui libère une grande quantité de dioxyde de carbone. D’autre part, pour produire du ciment, il faut porter à haute température de l’argile et du calcaire afin de créer du « clinker », le liant de base du ciment. Or, cette réaction chimique libère également du CO2 en grande quantité. Au total, en 2015, la production d’une tonne de ciment impliquait la libération de 663 kilogrammes de CO2.

En fait, fabriquer du ciment, c’est « faire l’inverse de ce que fait la nature, qui produit du carbonate de calcium en associant le calcium au CO2. L’industrie cimentière, en cuisant du calcaire et de l’argile ensemble, dissocie le CO2 du calcium », explique Laurent Izoret, le directeur délégué des produits et applications de l’Association technique de l’industrie des liants hydrauliques. Ce processus, dit de décarbonation du calcaire, est responsable des deux tiers des émissions de CO2 dans le processus global de fabrication du ciment (voir graphique).

Des solutions pour decarboner la cimenterie 

  • Energie 
  • Recyclage
  • Nouveaux matériaux
  • Sobriété énergétique

Afin de réduire l’impact environnemental de l’industrie cimentière, des solutions sont envisagées à plusieurs niveaux. Le processus de chauffage est une première entrée. En effet, selon les chiffres avancés par le thinktank écologique The Shift Project, rien qu’en améliorant l’efficacité énergétique des cimenteries pour les mener aux meilleurs standards mondiaux existants, les émissions de dioxyde de carbone du secteur cimentier pourraient être réduite de 10%. De même, une baisse dans les mêmes proportions pourrait être atteinte en substituant les combustibles fossiles utilisés dans les usines par des combustibles renouvelables. C’est ce vers quoi s’orientent peu à peu les industriels français mais les proportions de combustibles non renouvelables sont encore majoritaires. En 2020, elles atteignent encore 57% dans la production cimentière nationale.  

  • Recycler les bétons usagés

Les ressources naturelles étant limitées, les industriels se tournent peu à peu vers la réutilisation des bétons issus de la déconstruction des bâtiments existants. Aujourd’hui en France, la part des granulats de bétons recyclés (GBR) utilisés dans la production de béton n’atteint que 10% d’après les estimations du projet national RECYBETON. Mais même si l’utilisation des GBR est possible, reste que la porosité du béton issu du recyclage est plus grande. De ce fait, le matériau de seconde main est plus sensible à l’érosion, et donc a une durée de vie moins longue. Ainsi, il faut augmenter le pourcentage de liant utilisé pour palier la forte porosité et obtenir un béton viable. 

  • La carbonatation du béton 

Reste la solution la plus innovante développée par le projet FastCarb : la carbonatation accélérée du béton. En ayant recours à des matériaux spécifiques dans la production du béton comme des silicates hydratés en plus de l’utilisation des GRB, les chercheurs du projet FastCarb ont réussi à transformer le béton en un véritable puits de carbone. Le phénomène de carbonatation, c’est à dire de captage du CO2 par le calcium contenu dans le béton, est naturel mais relativement lent. Les avancées technologiques promises par le béton 2.0 développé par FastCarb permettrait de piéger directement le CO2 produit lors de décarbonation du calcium dans le béton, sans lui laisser le temps d’être relâché dans l’atmosphère. 

Cette solution apparement miracle est cependant encore au stade de projet et ce béton du futur n’est pas encore disponible sur le marché. L’objectif européen de réduction de 55% des émissions de CO2 d’ici 2035 est encore loin d’être atteint, malgré les solutions qu’Emmanuel Macron pourrait mettre sur la table. 


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