Le président de la République reçoit aujourd’hui à l’Élysée les dirigeants des 50 sites industriels les plus émetteurs de CO2 en France. Une concertation inédite qui cherche à faire de l’industrie le fer de lance de la décarbonation du pays.

À peine rentré de la COP27 en Égypte, Emmanuel Macron reçoit ce mardi les dirigeants de 50 sites industriels français. Leur particularité : il s’agit des 50 sites industriels français les plus émetteurs de CO2, selon une liste établie par l’Élysée. Cette discussion au format inédit a pour objectif d’accélérer la décarbonation du secteur industriel, qui représente environ 20% des émissions françaises de gaz à effet de serre.
Parmi les cinquante usines identifiées, dont on peut retrouver la carte ici : des aciéries, des cimenteries, des usines chimiques ou encore des fabricants d’engrais. À eux seuls, elles sont responsables de la moitié des émissions industrielles en France, soit 10% des émissions totales du pays.
« 100% des solutions »
Pour le ministre de l’Industrie Roland Lescure, interrogé ce matin sur France Inter, l’enjeu est clair : si l’industrie représente aujourd’hui « 20% du problème », elle recèle aussi « 100% des solutions ». Le ministre entend prendre les problèmes à la racine en décarbonant la production industrielle, pour diminuer dans la foulée les émissions de secteurs comme le transport ou le bâtiment. « Si on veut que […] tout ce qu’on a autour de nous soit neutre en carbone, c’est l’industrie qui apportera les solutions ». Et cela sans toucher à la demande, puisque l’Élysée précise que l’objectif du plan est de « baisser les émissions sans baisser la production ». Tout miser sur la technologie, en somme.
De ce point de vue, le géant ArcelorMittal, qui représente à lui seul 25% des émissions de tous les industriels invités par Macron, fait figure de bon élève. Le groupe de sidérurgie a lancé en début d’année un plan de décarbonation soutenu par l’État, qui prévoit des investissements d’environ 1,7 milliard d’euros sur les sites de production de Fos-sur-Mer (Bouches-du-Rhône) et Dunkerque (Nord). Ce plan entend maintenir la capacité de production des deux sites, et réduire leurs émissions grâce au recyclage de l’acier, à l’utilisation « à terme » d’hydrogène vert comme source d’énergie et à la capture de CO2 dans l’air.
Pourtant, ces deux derniers processus sont loin d’être opérationnels. Il y a deux semaines, ArcelorMittal annonçait que son site de Dunkerque capte désormais 0,5 tonne de CO2 par heure, alors même que le groupe en émet plus de 40 000 tonnes par jour en France (données 2019).
sobriété
Pour Matthieu Auzanneau, directeur du groupe de réflexion Shift Project consacré à la transition énergétique, la France ne pourra pas atteindre ses objectifs climatiques sans une baisse de la production industrielle. « On ne peut pas décarboner en apportant simplement des nouvelles technologies, affirme-t-il. Il faut préparer l’industrie à une baisse de la demande. »
Dans le scénario de transition présenté par le Shift Project, la demande de béton devrait diminuer de 30% d’ici à 2050, et celle d’acier de 20%. « L’industrie doit s’adapter à la sobriété » et au changement de nos usages, résume Matthieu Auzanneau.
Par ailleurs, tout ne repose pas sur le secteur industriel. Selon l’Agence de la transition écologique (Ademe), l’industrie est le quatrième secteur le plus émetteur de gaz à effet de serre en France, loin derrière les transports et ex-aequo avec les secteurs agricole et résidentiel-tertiaire.