C’est inédit : en janvier le groupe RN bénéficiera d’une niche parlementaire à l’Assemblée nationale. Dans son ordre du jour, deux propositions portées initialement par d’autres partis. Pragmatisme ou stratégie ?
Ce mardi 6 décembre au palais Bourbon, les députés du Rassemblement National ont présenté à la presse l’ordre du jour de leur niche parlementaire, qui aura lieu le 12 janvier prochain. Une grande première pour le parti, qui dispose depuis les dernières élections législatives d’un nombre de députés suffisant pour former un groupe parlementaire (il faut, au minimum, 15 députés).
Or pendant une niche, les groupes minoritaires et d’opposition peuvent déterminer les propositions débattues à l’Assemblée pendant toute une journée. Grâce à cette nouvelle opportunité, Marine Le Pen, présidente du groupe RN à l’Assemblée nationale, prétend répondre aux préoccupations des Français « avec pragmatisme et sans sectarisme« . Et n’a pas hésité à puiser des idées chez les camps adverses.
Recherche du consensus…
Mesure phare de l’ordre du jour du RN : la création d’une aide d’urgence pour les victimes de violences conjugales. Cette proposition de loi vient en fait de la sénatrice Valérie Létard (UDI). Elle a été adoptée à l’unanimité par le Sénat mais n’avait pas encore été mise à l’agenda de l’Assemblée. Le RN a donc pris les devants. « C’est un texte qui doit faire consensus » a décrété Emmanuel Taché de la Pagerie, député RN référent de la proposition, qui attend « un vote universel de la part de nos collègues. » Un moyen également d’embarrasser la majorité présidentielle à l’origine de la proposition : « Cela ne me réjouit évidemment pas que les premiers qui s’intéressent à un sujet pourtant déclaré « grande cause du quinquennat” soient les députés du RN. » a réagi Valérie Létard dans Le Monde.
… ou « récupération » ?
Autre reprise, toujours d’un groupe adverse : la réintégration du personnel soignant non vacciné. La Nupes l’avait déjà mis à l’ordre du jour de sa niche en novembre, sans avoir le temps de la discuter pendant la session. « Le RN retire sa proposition de loi et la remplace par celle de Caroline Fiat (députée LFI). […] Par ce geste fort, le RN montre qu’il fait passer l’intérêt des Français au-dessus des clivages partisans » a revendiqué le député RN Frédéric Falcon.
De quoi faire piquer à nouveau la Nupes, avec laquelle le RN entretient déjà des relations tendues. Matthias Tavel, député LFI, dénonce un « piège grossier et une récupération perverse et opportuniste« . La Nupes n’exclut d’ailleurs pas la possibilité de retirer son texte pour empêcher cette reprise. En octobre dernier, les députés RN avait déjà mis la coalition gauche en difficulté en rejoignant par surprise sa motion de censure contre le gouvernement.
À son agenda du 12 janvier, le RN prévoit également d’autres propositions, de sa propre initiative. Parmi elles : le port de l’uniforme scolaire, l’instauration du mode de scrutin à la proportionnelle, ou encore la présomption de légitime défense pour les forces de l’ordre. Des sujets qui n’auront probablement pas tous le temps d’être débattus pendant les 24 heures de la niche parlementaire.
Mara NOURY
