
Quelques jours après la clôture de l’enquête publique sur l’extension du centre commercial Rosny 2, les habitants du quartier Marnaudes-Bois Perrier restent partiellement informés sur ce projet. Dénoncé par plusieurs associations pour son impact environnemental, cette proposition pourrait venir dégrader un peu plus un cadre de vie déjà marqué par la pollution et la bétonisation.
Taux élevé de particules fines, îlots de chaleur urbains, pollution sonore, cumuls des chantiers : l’extension du centre commercial Rosny 2 inquiète les associations de défense de l’environnement mais pas forcément les riverains. « Je n’en avais jamais entendu parler, reconnaît Marie Nadia en sortant de l’école avec ces deux enfants, à quelques centaines de mètres de Rosny 2. Je pense que ça peut donner du travail aux gens d’ici », souligne-t-elle en se dirigeant vers l’entrée est du centre commercial.
Pour capitaliser sur la mise en service du prolongement de la ligne 11 d’ici 2023 et de la ligne 15 Est du Grand Paris Express d’ici 2030, Unibail-Rodamco-Westfield (URW), le gestionnaire du centre commercial, compte augmenter de près de 50 % la surface de Rosny 2. Une « opportunité importante » pour attirer un nouvel afflux de clientèle explique URW, qui prévoit une extension de la zone commerciale avec une aile dédiée à la restauration, un drive pour l’enseigne Carrefour et un immeuble de bureaux. Le tout faisant passer la surface du centre de 120 000 m2 à 180 000 m2.
Informée depuis huit jours
Des détails qui ne sont pas parvenu jusqu’à la compréhension des habitants. « Apparemment, ils vont agrandir le centre, mais je n’en sais pas plus. Ça ne fait que huit jours que je suis au courant », raconte Christiane, qui habite depuis 25 ans dans une des tours qui donne sur le centre commercial. Pourtant, ce projet a fait parler de lui. Lancés en 2019, les permis de construire avaient été approuvés par l’ancien maire suite à une première enquête publique, avant d’être suspendus en décembre 2021 par le tribunal administratif de Montreuil. En cause : une étude d’impact environnemental insuffisante. Une décision qui a contraint URW à fournir une nouvelle étude d’impact en mai dernier et a déclenché une nouvelle enquête publique clôturée lundi 5 décembre.
Plus de 500 personnes ont déposé une observation dans le cadre de l’enquête publique, mais l’association écologiste Alternatiba dénonce le manque d’informations délivrées par la ville de Rosny-sous-Bois. « On leur a demandé de communiquer, d’organiser une réunion publique pour expliquer le projet aux habitants, mais ils n’ont pas souhaité le faire, déplore Nicolas, membre de l’association. On a dû réaliser des tracts à nos frais pour informer les gens et les inviter à répondre à l’enquête publique. » Sur ce point, la mairie s’est contentée du minimum légal. « L’enquête publique a fait l’objet d’un affichage sur les panneaux municipaux et a été annoncée par deux avis dans la presse. De ce point de vue, la procédure a été respectée », souligne Michel Relave, un des trois commissaires enquêteurs.
« Noires de pollution »
Pour Saida, membre du conseil de quartier de Marnaudes-Bois Perrier, il y a aussi un manque d’intérêt des habitants pour ces questions : « Les gens s’en foutent. Même quand ça concerne leurs enfants ça ne les intéressent pas », explique-t-elle à côté de l’école maternelle encerclée entre les travaux des lignes de métro 11 et 15. Des travaux que subissent Jean-Claude et Martine au quotidien. Habitants de la tour 7E depuis plus de 50 ans, ils ont vu leurs espaces verts disparaitre pour laisser place aux chantiers. Lundi, ils se sont déplacés à la mairie pour déposer une observation dans le cadre de l’enquête publique. Opposés au projet d’extension de Rosny 2, ils estiment subir déjà de suffisamment de désagréments : « Nous sommes dans une cuvette à Rosny-sous-Bois », souligne Jean-Claude. « Entre les voitures, l’autoroute A86, les trains et les bus. Au bout de deux jours, j’ai de la poussière sur les meubles et les aérations sont noires de pollution. Ce projet va nous apporter encore plus de voitures et de pollution. À Rosny, on bétonne et on bétonne. Ça va à contre-courant de tout ce que l’on entend », ajoute Martine.

Une opinion partagée par les associations de défense de l’environnement de Seine-Saint-Denis, qui ont déposé des observations à l’enquête publique, pointant les manques de la nouvelle étude d’impact environnemental d’URW. Dans un rapport de huit pages, Environnement 93 estime notamment que la pollution de l’air, la réduction des îlots de chaleur urbains et la pollution sonore générés par l’extension du centre est largement sous-estimée dans l’étude d’impact. Des observations partagées par la mission régionale d’autorité environnemental dans un avis rendu au mois d’octobre : « L’étude d’impact conclut que pour l’extension du centre commercial « l’effet d’îlot de chaleur urbain est très limitée, de l’ordre de 0.1 °C, sans le démontrer ». Et pour ce qui concerne l’augmentation de la circulation automobile générée par l’extension, « l’autorité environnementale constate qu’aucune mesure n’a été proposée pour réduire l’impact lié à l’augmentation du trafic. »
« En cherchant à s’agrandir, le site va seulement accroître les nuisances. Aucune étude d’impact social n’a été réalisée pour démontrer que ça allait générer de l’emploi pour les habitants du quartier », souligne Nicolas, membre d’Alternatiba. L’association environnementale attend désormais de savoir si le maire de Rosny-sous-Bois validera les permis de construire après réception début 2023 d’une enquête publique où 90 % des avis sont défavorables. Auquel cas, l’association retournera devant le juge pour demander l’annulation du projet, avec l’ambition de pousser les acteurs à réfléchir à une nouvelle proposition plus favorable en termes d’impact écologique et social, et en concertation avec les habitants.
Baptiste Dedieu