
Expliquer l’épineux dossier de la réforme des retraites en une heure et demie. C’était le défi lancé à un panel d’économistes et d’hommes politiques au cinéma Pathé-Bellecour de Lyon. Il a notamment été question des changements liés à l’instauration d’un système par points.
« Moi-même je n’ai pas idée de ce que je pourrai toucher quand je serai à la retraite. » L’aveu de Jean-Marc Vittori, éditorialiste aux Echos, reflète l’illisibilité du système de retraite français. Modifié par de nombreuses réformes depuis 1993, le président Emmanuel Macron veut désormais opérer un changement systémique. Deux objectifs : simplifier le système et le rendre universel. Une vaste réforme qui suscite de nombreuses inquiétudes, notamment sur l’instauration d’un système de calcul des pensions par points au lieu des années cotisées.
Le modèle suédois
L’exécutif y voit la réponse au vieillissement de la population française. « L’enjeu sera tout de même de mettre en place des règles assurant le financement du système », annonce Hervé Boulhol, économiste à l’Organisation de coopération et de développement économique (OCDE). En Europe, quatre pays ont basculé vers un système à points, dont la Suède. Un modèle dont s’est inspiré le haut-commissaire aux retraites Jean-Paul Delevoye pour élaborer son rapport, dont les préconisations figurent en nombre dans le projet de réforme des retraites. Mais quel est le résultat dans ce pays scandinave ? « En plus de la transition, la Suède est entrée dans un processus législatif très long pour réformer son système de retraites, explique Hervé Boulhol. Il s’est passé quatre années, durant lesquelles tout pouvait être politiquement remis en question. »
Interrogations sur la valeur du point
Si le système à points venait à être adopté en France, il faudrait également s’accorder sur la valeur du point. « On ne peut pas acheter des carottes ou des tickets de cinéma en points », s’exclame Antoine Bozio, directeur de l’Institut des politiques publiques, suscitant l’hilarité des étudiants dans l’assistance. « Il faut donc s’interroger sur sa conversion en euros, et établir une règle stable pour ne pas avoir à ajuster sa valeur en fonction de la conjoncture économique », ajoute-t-il.

Le problème n’est pas là selon Anne Lavigne, responsable des études au Conseil d’orientation des études (service du Premier ministre). Elle soutient la mesure, au titre qu’elle uniformisera le système, sans que les assurés dépendent de plusieurs caisses de retraites. Un phénomène continu en lien avec la hausse des mobilités professionnelles des individus.
Nouvelles formes de retraites
Au-delà d’une réforme systémique, la retraite à points interroge sur les nouvelles formes de retraites. Antoine Bozio y voit un aspect positif : la possibilité pour les assurés de maîtriser leur départ à la retraite. « Au lieu de passer d’un temps plein à la retraite, pourquoi ne pas imaginer une réduction progressive du temps de travail, suggère-t-il avant d’ajouter : Le système à points permettrait également aux retraités qui souhaitent reprendre une activité de le faire. » Il n’est pas sûr néanmoins que cela intéresse une majorité de Français.
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