La crise du Covid a accentué la précarité des jeunes

D'après l'INSEE Modérateur, 9 % des moins de 30 ans ont perdu leur travail pendant la crise sanitaire.

Moins de petits boulots et des parents pas toujours en situation d’aider financièrement : depuis le début de la crise sanitaire, la précarité des moins de 25 ans s’est accrue. L’aide ponctuelle des associations et de l’Etat ne suffit pas à sortir ces jeunes de la pauvreté. Le sujet a été débattu ce vendredi lors d’une des dernières conférences des Jéco.

Mardi 2 novembre, le Premier ministre Jean Castex a annoncé la mise en place du « contrat d’engagement jeune » pour aider financièrement les 16-25 ans sans emploi ni formation. Avec cette allocation ciblée, le gouvernement espère aider 400 000 jeunes en 2022. Mais d’après un sondage d’Odoxa-Backbone commandé par « Le Figaro », plus de deux tiers des Français ne sont pas convaincus.

Et pour cause, elle apparaît comme une demi-mesure alors que la crise sanitaire a exacerbé la précarité des moins de 25 ans. « On fournit toujours entre 5 à 10 % d’aides alimentaires en plus sur tout le territoire, par rapport au niveau d’avant crise, rappelle Sébastien Thollot, directeur associatif du Secours populaire français. Et cette assistance concerne de nouveaux publics, comme les étudiants. »

Dans son Université catholique de Lyon, le recteur Olivier Artus a quant à lui observé cette détresse étudiante, aussi bien monétaire que mentale. « 20% d’entre eux étaient en situation préoccupante. Il y avait le problème de l’argent avec la perte des petits boulots, mais aussi l’apparition de troubles psychologiques. C’est ce qui arrive quand on est seul dans un appartement de 9 mètres carrés. » La fermeture des restaurants universitaires très bon marché et l’impossibilité de faire un stage gratifié n’ont pas aidé.

Chômage des jeunes en hausse

Le nombre de jeunes sans emploi ni formation, (dits « NEET » pour « Not in education, employment or training ») a augmenté avec la crise sanitaire. « Environ 15 % des 18-24 ans sont NEET, constate Elise Huillery, professeure de sciences économiques à l’université Paris-Dauphine. 35 % ont un travail mais une grande partie d’entre eux ont des revenus extrêmement bas. La moyenne de ces revenus est de 7 000 € par an. C’est très peu. »

Même constat côté INSEE Modérateur: Sylvie Le Minez y est responsable de l’unité des études démographiques et sociales, elle souligne un paradoxe concernant le marché du travail actuel : le taux de chômage a globalement baissé entre 2019 et 2021, mais si on ne se concentre que sur les moins de 25 ans, le chômage a augmenté. « Le taux d’emploi a chuté pour les classes d’âges en dessous de 30 ans. 9 % des jeunes qui avaient un travail l’ont perdu pendant la crise sanitaire. », analyse-t-elle.

Aucun filet social

Le travail des associations a été essentiel pour combler l’écart entre le début de la pandémie et l’arrivée des aides d’Etat. Il est loin d’être terminé car l’absence d’aides sociales durables se fait ressentir. « Les étudiants de plus de 25 ans ne touchent que le RSA, mais ce n’est jamais que 565 euros par mois, il faut réaliser ce que c’est. Quand aux 18-25 ans, ils n’ont rien du tout, même pas un emploi qui leur permet de cotiser, car la moitié sont étudiants. Ils n’ont aucun filet social », explique Elise Huillery.

Evaluation de l’école : le constat des inégalités

A cette précarité monétaire et psychologique s’ajoute un taux d’échec universitaire « considérable », mentionne Olivier Artus.  Pour lutter contre le décrochage scolaire, son établissement propose une année de remise à niveau d’un an, entre le bac et la première année de licence.

Membre du Conseil d’analyse économique, Elise Huillery livre quelques résultats d’une note qui sortira mi-novembre sur le sujet : l’impossibilité de certains parents à financer un logement pour leur enfants mène à l’abandon de cet étudiant. « C’est un non-sens car cela reproduit les inégalités sociales, souligne-t-elle, et c’est un non sens pour la société, qui perd de jeunes talents. » Pour endiguer cette pauvreté étudiante, il faudrait selon elle davantage investir dans certaines formations sous dotées, comme les filières professionnelles. « Le diplôme est le meilleur vaccin pour lutter contre la pauvreté. »

Juliette BOURGAULT