Yazid Arifi, de consultant à proviseur de l’École démocratique

Yazid Arifi revient sur son parcours personnel et professionnel lors d'un échange en visio le 14 décembre 2022. Alexandre Plumet / IPJ

Diplômé d’HEC Paris et ancien consultant pour de grands cabinets de conseil, Yazid Arifi a tout quitté pour ouvrir en 2016 l’École démocratique du 19e arrondissement de Paris, basée sur la pédagogie active et le principe des coopératives. Un modèle qu’il aurait aimé trouver lorsqu’il était encore sur les bancs de l’école.

Il y a encore cinq ans, Yazid Arifi n’aurait jamais pensé sa carrière ainsi. Depuis 2016, le trentenaire dirige l’École démocratique du 19e arrondissement de Paris. Cet établissement accueille chaque jour près de 40 élèves âgés de 5 à 18 ans autour d’une pédagogie active et collaborative, où les enfants construisent eux-mêmes leurs programmes et emplois du temps. Cette façon de travailler qui tend à se répandre dans l’Hexagone est proposée dans le nord de Paris par cette personnalité revendicatrice et franche, marquée toutefois par certaines ambivalences de parcours.

Né à Rabat d’un père diplomate, il a grandi aux quatre coins du monde. « J’ai vécu plusieurs années à Rome, à Genève et à New York », se rappelle Yazid Arifi. Une enfance « particulière » qui lui a transmis le goût certain des « autres » et de la « différence », les mots d’ordre de son projet d’école. Arrivé par hasard en classe préparatoire aux concours des écoles de commerce au lycée Descartes de Rabat, il décroche finalement HEC Paris, la meilleure école de commerce française.

« Quand j’étais sur le campus de Jouy-en-Josas, je me suis rendu compte d’un décalage avec les autres, notamment entre les élèves et les professeurs », se souvient Yazid Arifi. Étudier la finance ou le marketing, « notamment au moment des « subprimes » et des programmes austéritaires », lui a fait réaliser que ses camarades de classe, ses professeurs et son futur emploi « contribuaient à la situation catastrophique des enjeux économiques, sociaux et environnementaux du monde ». À ce moment-là, se souvient-il, « une conscience politique a émergé en moi »

Une conscience politique 

Avec du recul, l’École démocratique est un projet qu’il aurait lui-même apprécié trouver étant jeune. « J’ai toujours étudié dans de bonnes conditions parce que je n’avais pas de problèmes particuliers ou de souffrances réelles », explique le directeur de l’école, précisant que son établissement est aussi et surtout là pour accueillir des enfants atteints d’handicap, à l’image de troubles de l’attention, d’autisme ou de phobie scolaire. « Mais c’est vrai que j’aurais aimé trouver à mon époque un établissement comme celui que je dirige, sourit Yazid Arifi, enfin ne serait-ce qu’avoir le choix entre l’École démocratique ou classique. » Cette dernière est « non égalitaire et ne prend pas en compte la personnalité et la sensibilité de chaque élève », déplore-t-il avant de reprendre d’une voix grave : « Pour les élèves comme pour les professeurs, il serait temps que l’école classique disparaisse ! »

Ce parcours marqué d’ambivalences et « parfois de contradictions », reconnait volontiers le directeur, lui a ouvert les yeux sur le monde du professorat, et plus largement sur la société. À tel point qu’il s’est investi en politique. Un projet qui s’inscrit dans « la continuité de l’école démocratique », confie-t-il. En 2017, lors des élections législatives, le trentenaire s’est présenté en tant que suppléant sur la liste La France Insoumise de la 13e circonscription de Paris, située dans le 15e arrondissement de la capitale où il vivait avant de déménager à Pantin, un endroit qui lui « ressemble » d’avantage.

De l’autre côté de la rive, où il est installé depuis 2018, le trentenaire a multiplié ses initiatives engagées comme la création du collectif Nous sommes Pantin aux municipales de 2020, qui se veut « citoyen, ouvert et démocratique ». « Ce qui m’importe le plus, c’est d’aider les gens à mieux vivre et à réaliser leurs combats, comme j’ai eu l’occasion de réaliser le mien avec cette école. » Un projet « réussi » qui en amènera d’autres, espère Yazid Arifi d’un ton franc et assuré, à son image. 

Alexandre Plumet

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